Italie-Brésil 3 à 2 par la Cie Tandaim

Italie-Brésil 3 à 2 par la Cie Tandaim

italie_bresil.jpg

Una storia importante

Sur la scène du Gyptis, Alexandra Tobelaim nous fait (re)vivre le match Italie-Brésil, décisif pour accéder à la demi-finale du Mundial 82. Une occasion — en or — de faire, via le football, une sorte d’analyse sociologique du siècle.

L’auteur, Davide Enia, nous raconte le match tel qu’il l’a vécu à l’âge de huit ans, dans la salle à manger familiale, devant le poste couleur chèrement et nouvellement acquis par « la Mama ». Pour cet évènement, le cercle de famille s’est élargi aux voisins. Le ton, le rythme adopté est celui du commentateur sportif, c’est-à-dire qu’il épouse celui du jeu, alternant phases de tension, précipitations des évènements, parfois jusqu’au bord de l’apoplexie, et temps de replis. Le texte quitte parfois le terrain pour faire apparaître le sport dans sa dimension historique, sociale et politique. Dans sa dimension poétique aussi, que dégagent, tant elles sont inspirées, certaines actions des génies de ce jeu. Avant que la partie ne commence, le temps consacré à Garrincha, virevoltant ailier brésilien, évoque la mythologie du football. Celui, à la mi-temps du match, consacré au Dynamo de Kiev de 1940, raconte les « faits d’armes » — inutilement romancés par l’auteur — de ces sportifs rattrapés par la barbarie de la guerre et qui ont résisté, sous les yeux de leurs supporters redevenus leur peuple, en refusant de perdre devant une équipe du Reich. Ces divers temps du récit, et ces alternances de rythmes et de tensions sont illustrés à la guitare, tantôt acoustique tantôt électrique, par Jean-Marc Montera, homme à l’écoute s’il en est, excellent sur son aile gauche. Certaines actions particulièrement importantes sont racontées à la fois en accéléré et au ralenti ; le débit verbal en illustre toute la tension, le temps pris pour les raconter dépassant de beaucoup celui, fulgurant, de leur exécution. Le meneur de jeu Solal Bouloudnine devrait gagner en confiance et en volume au fil des tours, pour prendre le jeu à son compte. La tactique mise en place par Alexandra Tobelaim nous épargne, conformément aux directives de la F.I.F.A., l’usage de la vidéo pendant le temps du texte. Comme le disait Jean Vilar, « ce serait trop facile » et, surtout, cela nous détournerait du véritable sujet : dire toutes les dimensions de ce sport, exutoire des passions nationales, lieu d’exercice des superstitions obscures et rassembleur trans-générationnel dans les grandes occasions de toute une famille, un immeuble, une ville ou un pays.

Texte : Frédéric Marty
Photo : J.Couzinet

Italie-Brésil 3 à 2 par la Cie Tandaim était présenté du 21 au 25/02 au Théâtre Gyptis