Arrête ton cinéma ! sur o2zone.tv
Les calés du cinéma
Entre enquête approfondie au cœur du cinéma et amateurisme bon enfant assumé, l’émission Arrête ton cinéma ! est une bouffée d’air frais dans le monde impitoyable de la Web TV. Rencontre avec son créateur.
Jonathan Trullard prend son petit dej’ en regardant François Truffaut se demander ce qu’est un metteur en scène dans La Nuit américaine. La question est posée, l’enquête peut commencer. Jonathan réunit ses deux cadreuses et son preneur de son et part micro en main interroger les passants, les clients et les professionnels du cinéma qui croisent son chemin d’Aubagne à Aix-en-provence. Diffusée de façon irrégulière sur la Web TV participative O2Zone, Arrête ton cinéma !, qui met en ligne sa sixième émission le 30 novembre, choisit une question dans un film mythique et mène une enquête prétexte à parler de cinéma. Enchaînant micros-trottoirs et interviews de spécialistes dans une déambulation moins hasardeuse qu’il n’y paraît, Jonathan pose des questions simples qui font malgré tout avancer l’investigation. « Tout le monde à son niveau a quelque chose à dire sur le cinéma. On n’attend pas des réponses documentées, on veut donner la parole à tout le monde. » Le cinéma, c’est quoi exactement ? A quoi sert un court métrage ? Comment va le cinéma français ? Autant de questions qui font travailler les méninges des promeneurs comme des cinéastes. Et la force de l’émission vient de là. En interpellant à brûle-pourpoint, Jonathan produit de l’intelligence et de l’authenticité, à l’image de son modèle revendiqué : l’excellente émission de docu-reportage bucolique En campagne diffusée sur France 5. Mais ce qui donne son caractère attachant à ce projet, c’est avant tout la candeur et la naïveté maline qui se dégagent de l’ensemble. Une image, un son et une lumière parfois approximative, un interviewer candide et pugnace, un montage lâche qui laisse la place aux silences, aux hésitations et nous montre l’envers du décor. Du clap de départ aux cadreuses Marine et Anne qui entrent dans le champ, l’amateurisme contrôlé crée une familiarité sympathique et une proximité avec le spectateur qui est justement au cœur des ambitions de l’émission. Et l’incongruité de l’entreprise provoque des débats souvent plus intéressants que les éternelles interviews de réalisateurs en tournée promotionnelle. Après Virginie Despentes et François Ozon, la prochaine édition verra Emmanuel Germond (démiurge du Festival du film chiant) et Olivier Assayas partager l’affiche avec des anonymes pour réfléchir à l’intérêt des « films à handicaps commerciaux ». Juste pendant la semaine du Téléthon…
Daniel Ouannou