Mémoire de la Station Sanitaire : exposition permanente au Musée Regards de Provence
L’hygiène et son dessein
La Fondation Regards de Provence, qui promeut depuis 1998 la peinture de Provence et de la Méditerranée, a quitté le Palais des Arts pour s’installer dans un bâtiment atypique qu’elle a rénové, et auquel elle consacre une passionnante exposition.
Un bâtiment… et pas n’importe quel bâtiment ! Muré, squatté, vandalisé, coincé entre deux voies rapides, il était voué à la destruction avant qu’une pétition, signée par de grands noms de l’architecture, mette en lumière l’aspect patrimonial de la Station Sanitaire livrée par Pouillon, Egger et Champollion en 1947 (classée au Patrimoine du XXe siècle). De style international et hygiéniste, elle permit une approche nouvelle, rationnelle et scientifique dans l’accueil et le traitement sanitaire des passagers qui débarquaient à Marseille. Bien que conçue pour accueillir 3000 à 4000 personnes par jour, elle en traitera à peine un millier avant de fermer au début des années cinquante, devenant inutile face aux nouvelles normes de l’OMS qui généralise le carnet de santé et la vaccination avant les départs, et non plus à l’arrivée. L’histoire de ce bâtiment, de sa conception et de son fonctionnement font l’objet de l’exposition permanente Mémoire de la Station Sanitaire. Mais il s’agit ici surtout de raconter l’histoire de Marseille, ce port qui, de tout temps, a accueilli les richesses venues par-delà les mers mais également leurs fléaux, et comment les institutions ont toujours essayé de s’en prémunir. Il est d’ailleurs marquant d’appendre que la peste destructrice de 1720 aurait pu être contenue dans le Lazaret d’Arenc, comme le prévoyaient les procédures de mise en quarantaine, si les riches négociants marseillais n’avaient pas fait pression pour passer outre et récupérer le précieux chargement : des balles de coton infestées de puces du rat porteuses de la peste, occasionnant au passage 100 000 morts !
Constituée de trois films documentés par des peintures et des photos d’époque, l’exposition est ponctuée d’une scénographie électronique de Dominik Barbier et Anne Van den Steen mettant en son et lumière la salle des étuves de la Station sanitaire. Une immersion dans le passé pour ce bâtiment du présent.
Damien Bœuf