Chaque nouvel arrivage de séries made in US réserve son lot de perles. La qualité de l’offre impressionne, mais la quantité empêche souvent de donner une véritable chance à chaque série. Session de rattrapage obligée pour The Wire (Sur écoute en VF), série produite par HBO et diffusée depuis 2002 aux USA. Quatre saisons au compteur, une seule diffusion française interrompue rapidement mais une sortie en DVD, sur lequel il faut se ruer : démonstration par le menu. The Wire compte treize épisodes par saison, ce qui n’est pas qu’un détail. Les écueils du remplissage et du temps mort ronronnants y sont brillamment évités, contrairement à 24 heures chrono ou Prison Break, séries championnes toutes catégories de l’enlisement fatal pour cause de vingt-quatre épisodes à tenir et autant de rebondissements. L’action se déroule à Baltimore, ville portuaire assez sinistre et personnage à part entière. Chaque saison se concentre sur une enquête et s’attache à la description d’un microcosme particulier. On plonge ainsi en apnée, au fil des investigations, dans une cité régie par le trafic de drogue, dans le quotidien des dockers polonais trimant et magouillant parmi les containers ou bien encore dans les coulisses de commissariats de police, rongés par le manque de moyens et la corruption. Le scénario suit ainsi les pas des protagonistes de tous bords. Caïds ou flics, politiciens ou dealers : le temps de parole à l’écran est équitablement réparti. Simple ruse scénaristique dans Boomtown, ce procédé confère à The Wire une subtilité et un réalisme étonnants. Depuis The Shield — qui a renouvelé le genre de la série policière avec brio mais également un brin de roublardise clinquante — on croyait dépassées les peintures hyperréalistes et humanistes qui osent prendre leur temps. The Wire revient sur le terrain foulé il y a quelques années par NYPDB, mais donne cette fois la parole à tous ceux touchés, de près ou de loin, par la logique criminelle. L’Amérique va mal et la série s’invite au cœur de ce malaise social, sans tape-à-l’œil, juste armée de son âpre efficacité. A découvrir absolument, en version originale, si possible…
Flore Cosquer