2013 passe la troisième
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In, Off, Alter Off, Out… A quelques mois de l’intronisation de Marseille Provence en tant que Capitale européenne de la culture, une certaine effervescence commence à poindre dans le petit milieu culturel et artistique local. Tout le monde veut sa part du gâteau et les initiatives se multiplient pour que le territoire ne rate pas son échéance capitale. Revue des effectifs en présence.
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Courant alternatif
Du beau et du laid, du bon et du chiant, du mythique et du kéké… Le Off promet une année 2013 à l’image de la cité phocéenne : joyeusement paradoxale.
Vendredi 13 avril : la date est symbolique à plus d’un titre. On ne s’étonnera donc pas que les trublions de Marseille 2013 l’aient choisie afin d’annoncer OFFiciellement leur programme pour une Capitale qu’ils appellent de leurs vœux depuis de longues années déjà, avant même que la cité phocéenne n’obtienne le fameux sésame (cf. Ventilo #… 189 !). Portée par la volonté de « replacer l’artiste marseillais au centre de l’événement », l’équipe du Off entend affirmer ce que Jean-François Chougnet, actuel directeur de MP 2013, a lui-même rappelé lors du débat qui a suivi la présentation du programme : « Le In s’occupe de la culture, le Off de l’art. » Ainsi, comme le souligne Stéphane Sarpaux, journaliste au Ravi et co-fondateur de Marseille 2013, « si la culture peut être instrumentalisée pour des opérations de requalification urbaine, l’art ne peut pas l’être car son objectif n’est pas d’ordonner, mais de créer le désordre, de provoquer la secousse, et celle-ci peut avoir lieu partout… » Dont acte avec une programmation articulée autour de quatre axes principaux incarnant les nombreux paradoxes marseillais : « Poubelle la ville » (« parce que Marseille est laide et belle à la fois »), « Merguez Capitale » (« parce que Marseille est cosmopolite, mais aussi un village »), « KalashnikOFF (« parce que Marseille est inégalitaire mais solidaire ») et « Mytho City » (« parce que Marseille se transforme, mais se la raconte aussi »). Au-delà des bons mots et des accents farceurs d’une telle présentation, on retiendra le sérieux de nos joyeux drilles, qui ont travaillé d’arrache-pied – et bénévolement – pour assurer au moins un temps fort par mois pendant l’année capitale. Du savoureux Banquet de Platon, prestation culinaire en forme d’hommage aux racines grecques de la ville, au festival Phocéa Rocks (qui a dit que Marseille n’était pas une ville rock ?), en passant par le désormais fameux « Chiant », toute personne un tantinet curieuse de voir ce que les artistes locaux ont à offrir devrait y trouver son compte. Et son bonheur. Sans compter les projets satellites qui ne cessent d’affluer sur le site Internet de la manifestation. Reste l’épineuse question du financement. Si, à l’heure actuelle, le budget du Off avoisine le nombre de buts marqués par Gignac pour l’OM, son équipe ne désespère pas de décrocher une aide institutionnelle, à hauteur du « 1 % artistique » (1). Elle en appelle aussi au secteur privé, donnant rendez-vous au monde économique local le 22 mai prochain à la Boate pour une rencontre que l’on souhaite fructueuse.
CC
Rens. www.marseille2013.com
Pour (ré)écouter le débat : www.radiogrenouille.com/antenne/marseille-2013-le-off-pour-quoi-faire/
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Le Out : le dernier lieu où l’on tchatche
Porté par l’équipe du Comptoir Toussaint-Victorine, qui a accueilli la conférence de presse du Off, le Out se veut « un espace de mise en débat sur l’année capitale et les politiques culturelles, mais aussi un lieu de rassemblement du tiers secteur associatif culturel et des artistes locaux afin de défendre et valoriser leurs actions avec plus de poids et de visibilité. » Les questions à traiter ne manquent pas pour nos « tchatcheurs », qui ont prévu un premier débat le 11 mai prochain sur « la lutte machiste, féroce, que se livrent depuis des années les collectivités territoriales dans l’escalade à l’équipement culturel. » Tout est dans le titre : « La mienne est plus grosse que la tienne (de culture) ». On vous en reparle très vite.
CC
Rens. www.outof2013.org
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Rencontre du troisième type
A l’initiative de l’artiste plasticien Louis Alesandrini et de quelques amis ne se reconnaissant pas dans les projets actuels du In comme du Off, une troisième manifestation se profile à l’horizon 2013 : l’Alter Off. Et celui qui se surnomme lui-même « l’emmerdeur culturel » n’a pas peur de cogner sur tout le monde !
« Le In ne laisse aucune place aux artistes de la région. Ils ont un budget énorme, mais le dépensent pour inviter des artistes des quatre coins du monde. Ils ont oublié la richesse culturelle et associative de Marseille. Ce label, qui devrait servir à donner une vitrine aux artistes marseillais, est devenu un simple projet d’urbanisation. » A entendre Louis Alesandrini, on se dit que le Off, dont les initiateurs tiennent peu ou prou le même discours, était tout désigné pour accueillir sa verve. Mais notre homme n’a pas voulu les rejoindre : « Je ne goûte ni leur humour douteux ni leur stratégie. Ils sont trop dans la com’. Et puis ils se prétendent en opposition avec la politique du In tout en installant leurs locaux rue de la République, symbole de la gentrification du centre ville ! (2) »
Et l’artiste n’en est pas à son coup d’essai. Président de l’association ART13, qui milite pour l’ouverture d’ateliers artistiques à Marseille, il fustigeait déjà l’organisation de l’évènement dès février 2011 dans sa lettre ouverte Tout va très bien, Madame la marquise. Incontournable poil à gratter de la vie artistique phocéenne, Louis Alesandrini relève, à l’instar de François Bayrou, le défi de la « troisième voie ». « Nous sommes ouverts à tous les projets, et contrairement au In, il n’y a pas de thème imposé. Nous voulons aussi ouvrir la manifestation aux petites villes et aux villages de notre région, dépasser les frontières de Marseille et arrêter de privilégier les grandes villes. » Lancé fin janvier, l’Alter Off commence peu à peu à recevoir des propositions via son site Internet. Malgré le flou et les contradictions qui émaillent le projet pour l’instant, sentir monter l’effervescence culturelle à l’approche de 2013 a quelque chose de particulièrement réjouissant et inattendu. Dommage que la fin du monde soit en 2012…
Daniel Ouannou
Rens. http://marseilleprovence2013alteroff.com/
Droit de réponse suite à cet article…
Premièrement, je n’ai pas déclaré que le Off a ses locaux rue de la République, mais qu’il s’est fait prêter des locaux pour la Trocade pendant trois jours par la société qui gère le parc immobilier de cette partie de la rue. Alors qu’ils se disent opposés à la gentrification et la spéculation immobilière, c’est incohérent de leur part.
Deuxièmement, une note de la rédaction précise que l’équipe du Off regrette que je n’aie pas répondu à leur invitation de présenter notre manifestation pendant leur conférence de presse ou à celle de participer au débat qu’ils organisaient avec Radio Grenouille.
Eric Pringels du Off m’avait envoyé un mail pour me proposer une table à la conférence de presse, comme leurs artistes porteurs de projets. Je l’ai remercié et décliné l’offre, car cela ne serait pas utile à l’Alter Off. L’Alter Off n’est pas un projet sous l’égide du Off, mais une manifestation totalement indépendante, du In, du Off et du Out.
Ensuite, contrairement à ce que déclare le Off, je n’ai jamais été invité au débat du 13 avril dernier (que j’ai découvert par hasard sur Facebook via le profil du Ravi), comme peut vous le confirmer l’animateur de Radio Grenouille Marc Voiry. Je pensais venir à la conférence de presse le 13 avril au Comptoir Toussaint-Victorine, mais n’ayant pas été invité alors que les diverses manifestations concurrentes en 2013 étaient annoncées participantes au débat, j’ai décidé de ne pas m’y rendre, déçu par le manque de courtoisie du Off. Et je suis encore plus déçu de voir qu’ils disent regretter que je n’y aie pas répondu. J’aurais volontiers participé à ce débat. L’Alter Off tient à son indépendance et cohabite pacifiquement avec les autres manifestations.
Louis Alesandrini, membre de l’Alter Off 2013
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Leurs petites entreprises…
Parmi les propositions du In, les Ateliers de l’EuroMéditerranée se démarquent par leur côté atypique et innovant.
65 ateliers, autant d’artistes et d’entreprises et encore bien plus de bénévoles ont participé, participent et participeront aux Ateliers de l’EuroMéditerranée – AEM pour les intimes. Imaginé par l’ancien directeur de MP 2013, Bernard Latarjet, le projet marie création contemporaine et monde de l’entreprise. « Cette idée a vu le jour pour plusieurs raisons, la plus importante étant que lors de la candidature de Marseille, il y a eu une implication très forte du milieu économique. Bernard Latarjet a eu envie de créer un autre lien que celui du mécénat, d’où ce projet de résidences artistiques au sein des entreprises », explique Sandrina Martins, responsable des AEM.
Le concept est original : il s’agit pour les entreprises participantes d’accueillir un artiste au sein même de leurs locaux et de lui laisser toute latitude pour créer une œuvre qui sera ensuite présentée lors de l’année capitale. « Même si les entreprises qui acceptent de jouer le jeu ont au préalable validé le projet de l’artiste, elles ne peuvent pas savoir exactement à quoi ressemblera l’œuvre une fois terminée. Lorsque la collaboration est mise en place, l’artiste n’a aucune pression, il est totalement libre dans sa création. Il ne s’agit pas pour lui de réaliser une commande, mais de laisser libre cours à son imagination et ces lieux, différents d’un atelier classique, auront forcément un impact sur sa créativité. »
Parmi les créations très attendues, certaines font déjà l’évènement. « Non seulement il y a une démarche artistique, mais la rencontre entre le monde de l’art et celui de l’entreprise a donné lieu à un rapprochement entre les participants et une certaine ouverture d’esprit. Par exemple, l’artiste égyptien Wael Shawky a travaillé avec l’école de céramique et les entreprises de santonniers d’Aubagne, et son projet est devenu un véritable enjeu pour le territoire. Il a réuni deux cents personnes alors que c’est un milieu très divisé. Son projet a permis de toutes les fédérer. Et puis il y a la chorégraphe Kitsou Dubois, qui accompagne la création du ballet annuel de la Patrouille de France. Ce projet donne une dimension internationale aux Ateliers puisque la Patrouille se produit à travers le monde. »
Une vingtaine d’ateliers sont déjà terminés, d’autres suivent leur cours et une trentaine sont encore à mettre en place. « Nous ne mettons aucune pression, ni sur les entreprises ni sur les artistes. On se contente de mettre en contact ceux que l’on pense complémentaires. Après, la collaboration se fait ou pas. »
Rendez-vous en 2013 pour découvrir ces créations originales, car pour l’instant, seuls les employés des entreprises participantes ont le privilège de voir les œuvres finies.
Aileen Orain