Chronique | 600 euros de Adnane Tragha
Pour 600 balles, t’as plus rien
Le réalisateur Adnane Tragha accompagnera, le 6 juin au Méliès de Port-de-Bouc et le lendemain aux Variétés à Marseille, son premier opus 600 euros, film guérilla tourné dans l’urgence, dont l’économie de moyens ne s’oppose nullement à la pertinence de la réalisation.
Le budget moyen d’un long-métrage de fiction, en France, s’élève à environ 4,7 millions d’euros. Un coût astronomique qui explique en partie l’industrie du cinéma hexagonal : le poids des contraintes financières, la lourdeur administrative (en l’occurrence vis-à-vis des commissions de soutien), l’influence majeure des chaînes télévisuelles, les salaires indécents des acteurs, autant de marqueurs d’une certaine tendance du cinéma français qui tendent à scléroser la création, à freiner toute inventivité, à censurer — de la part même des auteurs — les formes narratives plus expérimentales, à brider le récit pour atteindre peu ou prou un certain niveau d’uniformisation dont beaucoup semblent se contenter. L’urgence se fait rare, le cinéma guérilla peine à trouver le chemin des salles, d’autres formes, réinventées, restent très marginales, au contraire d’autres cinématographies souvent chroniquées dans ces colonnes (les pays du Maghreb, l’Amérique Latine). Il arrive cependant que déboulent sur nos écrans quelques « OCNI » (objets cinématographiques non identifiés), qui donnent à nouveau foi dans la capacité que possède le cinéma à refléter l’urgence d’un monde en marche, et dont les ressorts nous parviennent déformés par le prisme médiatique. C’est le cas du premier long-métrage d’Adnane Tragha, 600 euros, qui, à l’instar de cet autre film guérilla que fut en 2010 l’opus de Djinn Carrenard Donoma, nous plonge dans le quotidien de personnages habités par cette même urgence de trouver leur voie dans une société par essence excluante dès lors qu’on n’en accepte plus les règles, celles d’une consommation hébétée, d’une soumission parfaite au système en place. En toile de fond du fil narratif, l’élection présidentielle de 2012. Les personnages du film s’inscrivent dans la grande Histoire, thème classique et non moins passionnant du cinéma, et soulèvent alors de nombreuses questions qui secouent encore aujourd’hui la société française : quel est le sens du vote — et de l’engagement politique — pour de nombreux citoyens rattrapés par la désillusion, comment faire face aux difficultés sociales et économiques récurrentes, comment agir contre la montée du Front national, comment s’organise la vie d’un étranger dans cette société si peu apaisée ? Le réalisateur Adnane Tragha viendra accompagner les projections du film à Port-de-Bouc et à Marseille. L’occasion d’échanger collectivement, en sa présence, sur un état du monde trop souvent caricaturé par les mass médias dominants.
Emmanuel Vigne
Projections :
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le 6/06 au Cinéma Le Méliès (12 rue Denis Papin, Port-de-Bouc).
Rens. : 04 42 06 29 77 / http://cinemelies.fr
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le 7/06 au Cinéma les Variétés (37 rue Vincent Scotto, 1er).
Rens. : 09 75 83 53 19 / www.facebook.com/Cin%C3%A9ma-les-Vari%C3%A9t%C3%A9s-220926444692986
Pour en (sa)voir plus : www.facebook.com/600euros/
le 6/06 au Cinéma Le Méliès (12 rue Denis Papin, Port-de-Bouc).
Rens. : 04 42 06 29 77 / http://cinemelies.fr
le 7/06 au Cinéma les Variétés (37 rue Vincent Scotto, 1er).
Rens. : 09 75 83 53 19 / www.facebook.com/Cin%C3%A9ma-les-Vari%C3%A9t%C3%A9s-220926444692986