Il est des séries novatrices, brillantes, dérangeantes ou séduisantes qu’il faut savoir ne pas regarder jusqu’à leur dernier souffle. Au palmarès des bonnes raisons de s’abstenir, on trouve : lassitude pour…
Il est des séries novatrices, brillantes, dérangeantes ou séduisantes qu’il faut savoir ne pas regarder jusqu’à leur dernier souffle. Au palmarès des bonnes raisons de s’abstenir, on trouve : lassitude pour 24 au bout de la troisième répétitive saison, agacement pour The L word dès la deuxième complaisante saison et age pour la cinquième et dernière saison de Six feet under, déprimante et misanthrope.
Mais il ne faut surtout pas juger cette immense série que fut Six feet under à l’aune de quelques dérapages scénaristiques et stylistiques de fin de course. Flashback. Durant quatre saisons, le spectateur a eu accès à une vision décalée, crue, salvatrice, baroque et drôle de la mort clinique. Cadavres bavards, vivants perclus de névroses et autres délices psychanalytiques, ces personnages se croisent et se recroisent dans le théâtre d’une entreprise de pompes funèbres. L’impression est d’abord étrange, on regarde l’intimité de la mort en face et, dans un premier temps, ce procédé la déréalise complètement. Un embaumement ou une reconstruction faciale post-mortem ne font ni chaud ni froid. Puis soudain, au détour d’un plan ou d’une phrase, l’émotion surgit, intense, saine. Cette atmosphère inédite est — forcément — garantie par HBO, qui produit la série et y instille ses fondamentaux : acteurs impeccables, dialogues jubilatoires et mise en scène assez originale, jouant sur des décors tantôt naturels tantôt en studio et sur des lumières très artificielles et travaillées.
Les errements sentimentaux et professionnels de la famille Fischer font mal et, attention lieu commun, ça fait du bien.
Flore Cosquer