Les boutiques de Cannelle de Wladyslaw Znorko par le Cosmos Kolej
Place aux jeunes talents : Le jardin des délices et La Lune des Pauvres
Tangentes, cirque aérien par la Cie MPTA
Histoire de mon corps, par Le Studio de l’aube d’après Hervé Guibert
Les boutiques de Cannelle
_De Wladyslaw Znorko par le Cosmos Kolej
Après quatre années à œuvrer dans l’ombre, à mitonner des spectacles, des projets, des rencontres et de mettre en œuvre le chantier d’aménagement du lieu, la Gare Franche ouvre enfin grand ses portes avec Les Boutiques de Cannelle. Un couple de commerçants va au théâtre un dimanche avec son fils. Le père a oublié son portefeuille, il envoie son fils le chercher. Mais tout a changé, les rues sont dans un grand désordre, le garçon oublie sa mission pour redécouvrir sa petite ville ordonnée maintenant selon une nouvelle logique, celle du rêve. La fameuse « chambre » du Traité des Mannequins — la première collaboration Znorko/Schulz — devient donc le « théâtre » d’où nous assistons à l’exploration de la ville par le fils, bouleversé de bonheur autant par cette soudaine liberté que par la beauté du ciel étoilé. Depuis vingt ans, Znorko invente des espaces pour le rêve où les spectateurs ont leur rôle à jouer en mêlant leur imaginaire à celui de Schulz. Un très beau rêve éveillé.
_ Jusqu’au 31 à la Gare Franche
Place aux jeunes talents
_Le jardin des délices par la troupe de l’Ecole Normale Supérieure Lettres et Sciences Humaines de Lyon et La Lune des Pauvres par la Cie Le bruit des hommes
Heureuse initiative que celle du Gyptis qui clôture sa saison en invitant deux jeunes compagnies à se produire sur sa grande scène. Dès mercredi, les élèves de l’ENS de Lyon entameront les hostilités avec une adaptation millimétrée de la pièce d’Arrabal. Conformément aux desseins de l’auteur espagnol (qui l’avait lui-même adaptée sur les planches), Le jardin des délices favorise en effet le mélange des tons et des registres en privilégiant les ressorts visuels (cf. le jeu de lumières). Se nourrissant de l’esthétique baroque du triptyque de Jérôme Bosch (auquel le titre fait explicitement référence), la mise en scène de Keti Irubetagoyena offre une nouvelle vie à cette histoire de femme hantée par son passé. Quant à la compagnie Le bruit des hommes, elle s’attaque à la langue brute du poète Jean-Pierre Siméon en livrant une version douce-amère de sa « tragédie baroque » La lune des pauvres. Soit le récit, entre poésie sordide et humour noir, de deux SDF, clowns tristes racontant la rue, le rêve et le reste.
_Les 23, 24, 29 & 30 au Gyptis
Tangentes
_Cirque aérien par la Cie MPTA
Les élans jogguesques de notre Président en sont les plus éloquents des symboles : nous vivons dans un monde où tout pousse à courir (fuir ?) et où certains décident que d’autres doivent courir plus ou moins vite. En témoignent ces machines à mouvement — tapis roulants, roue, mât chinois, moteurs… — qui occupent la scène de Tangentes, dernière création en date du trampoliniste Mathurin Bolze. En apesanteur, entouré de quatre acrobates et deux musiciens, l’homme volant livre ici une réflexion sur l’oppression et la résistance en inventant un nouveau langage expressif, relevant autant du cirque que de la danse ou du théâtre. En prenant la (les) tangente(s) dans un univers où l’absurde côtoie l’onirique, la compagnie les Mains, les Pieds et la Tête Aussi amène ainsi le spectateur à « questionner l’homme dans ses démesures, ses fraternités, ses doutes », pour finalement interroger l’humanité — son humanité. Et changer sa perception de la gravité (et de la chute). Intelligent et virtuose.
_Les 24 & 25 au théâtre des Salins (Martigues) dans le cadre de Cirk’ en Mai
Histoire de mon corps
_Par Le Studio de l’aube d’après Hervé Guibert
De sa naissance, en 1955, à sa mort, en 1991, l’écrivain Hervé Guibert n’a cessé de se mettre en scène, au fil de ses romans, de ses nouvelles, en tant que personnage de jeune homme fougueux, témoin et portraitiste de toute la vie intellectuelle et artistique des années 80. Du règlement de compte familial en plein cœur des Trente Glorieuses aux portraits sans concession de ses proches — des personnalités qu’il est amené à côtoyer par son emploi de journaliste au Monde —, en passant par la chronique de sa mort annoncée en plein cœur de l’épidémie du sida, la vie d’Hervé Guibert était faite de tendresse caustique, dont cette biographie théâtrale, incarnée par Laurent Kieffer, rend toute la richesse et l’intelligence. Avec un humour à froid, un doigt de méchanceté délicieuse et une autocritique sans concession, Histoire de mon corps est le voyage sans retour d’une des figures marquantes de cette fin de XXe siècle français. Ceci est son corps, ne vous en privez pas.
_Du 25 au 27 au Théâtre du Têtard
CC/HS