Tu es mort il y a bientôt soixante-six ans, le 22 octobre 1941.
Ton amour pour tes proches, ton jeune âge, ton courage et ton sacrifice sidèrent la pensée par l’émotion qu’ils font naître. D’emblée, ils tiennent la critique à distance. On ne peut qu’adhérer à ta lettre…
Tu es mort il y a bientôt soixante-six ans, le 22 octobre 1941.
Ton amour pour tes proches, ton jeune âge, ton courage et ton sacrifice sidèrent la pensée par l’émotion qu’ils font naître. D’emblée, ils tiennent la critique à distance. On ne peut qu’adhérer à ta lettre.
Cela permet d’évacuer le fait que si tu étais résistant, tu étais avant tout militant communiste ; et que c’est pour avoir travaillé à plus de justice entre les hommes que tu fus arrêté par la police française, en vertu d’un décret interdisant la propagande communiste.
Cela permet d’éluder que si ta lettre exalte la patrie, c’est pour en défendre la liberté aliénée par la collaboration, et que si elle vénère l’amour familial, c’est dans le partage d’idéaux communs de justice sociale.
Tu as été exécuté par les Allemands, mais sur proposition du ministre de l’Intérieur de l’époque, qui avait sélectionné des communistes « pour éviter de laisser fusiller cinq bons Français ». Si tu revenais aujourd’hui, tu verrais ta lettre dévoyée par un régime politique qui traite comme des chiens ceux qui ne sont pas en règle. Un régime sous lequel des enfants ou des femmes sont terrorisés par la police française.
Tu verrais ton engagement communiste passé sous silence, ou à peine effleuré.
Tu te demanderais pourquoi l’actuel président de ton pays, ancien ministre de l’Intérieur, enjoint aux enseignants de lire ta lettre chaque année aux lycéens.
Tu te demanderais dans quel but on instrumentalise ainsi ta jeunesse et ton courage.
Tu t’interrogerais sur le type de sacrifice que l’on suggère ainsi à la jeunesse de ton pays.
Tu te dirais que ton exemple est peut-être plus que jamais d’actualité…
Mélanie Rémond