Bourguiba, le combattant suprême

Cinémémoire

Trou de mémoire

 

Les coupes budgétaires ont fragilisé ces dernières années de nombreuses structures culturelles régionales. Parmi elles, Cinémémoire, et son binôme Circuit Court, dont les activités dépassent largement l’enjeu culturel, s’imposant dans une dialectique de la mémoire partagée.

 

Une récente pétition a fait particulièrement parler d’elle : la structure phocéenne Cinémémoire, associée à Circuit Court, tirait la sonnette d’alarme quant à la survie de ses activités. Malgré plus de vingt années d’activisme cinématographique, les institutions décidaient de supprimer, à l’instar de nombreuses associations régionales, une partie des financements attribués à Cinémémoire et Circuit Court, mettant de ce fait l’existence même des deux structures en danger. Claude Bossion, à la tête des deux entités, revient sur l’importance du travail effectué quant à la préservation, l’archivage, la numérisation et la diffusion de ce trésor audiovisuel et cinématographique : « Il faut impérativement que la collectivité s’engage pour la préservation d’une mémoire d’archives en région. Le budget requis n’est pourtant pas énorme, mais sans un minimum vital, nous ne pourrons nous donner les moyens de conserver cette mémoire régionale, sans laquelle nous ne pouvons pas construire l’avenir. On le sait : il n’est pas de futur possible sans comprendre notre passé, a fortiori régional. » La démarche stakhanoviste de Cinémémoire a permis au fil des ans de constituer un fond d’images impressionnant, mais également d’exploiter intelligemment ce corpus à travers la diffusion, la production de documentaires ou l’édition DVD. La démarche de l’équipe de Cinémémoire est donc plurielle, et a largement prouvé sa capacité à rendre le plus vivant possible un fond mêlant films amateurs et professionnels, ainsi qu’œuvres cinématographiques. Claude Bossion souligne par ailleurs : « Notre travail, en 2014, consistera à construire un lieu de conservation de cette mémoire régionale, à Marseille. On ne peut donner à l’INA, malgré leur boulot incontestable, le monopole d’archivage des sources. La mémoire se doit d’être plurielle, accessible, proposée au sein d’un lieu d’échanges. Par ailleurs, nous avons aussi beaucoup focalisé notre activité sur la création. C’est pour cette raison que nous avons ajouté à notre fond les films des réalisateurs de l’ARSE (NDLR : l’Association des Réalisateurs du Sud-Est), car à quoi cela sert-il d’aider à financer des films si ceux-ci restent inaccessibles ? Notre travail de diffusion va également dans ce sens. » Le fait qu’une structure indépendante offre un tel panel d’activités autour de l’image d’archives en région est un exemple quasi unique en France. Il paraît donc inenvisageable que Marseille se prive d’une telle richesse, à l’heure où l’enjeu sur le fond patrimonial est largement abordé sur le terrain politique. Quant aux futures activités, Claude Bossion affiche un déterminisme sans faille : « Nous continuerons, comme c’est le cas depuis quelques années, à travailler sur notre fond touchant l’histoire coloniale. Et ce à travers la mise en place d’ateliers jeune public, d’édition et de projections publiques. A ce propos, sur un autre sujet, nous organisons le 13 décembre un événement à l’Alcazar, sur le thème de l’agriculture en Provence, avec un ciné-concert en présence de Pierlo Bertolino de Dupain, à la vielle à roue, ainsi qu’une exposition, à partir du 2 novembre, à la galerie la Traverse, autour de l’exhumation de la mémoire audiovisuelle du Bénin. » Une occasion pour le public phocéen de venir soutenir un travail qui, par essence, s’inscrit dans une vision historiographique de notre patrimoine.

Emmanuel Vigne

 

Prochaine projection : Bourguiba, le combattant suprême de Patrick Cabouat et Guy Darbois, précédé par Inondation en Tunis et Carthage en 1956, film d’archive amateur du fonds de Cinémémoire, le 16/10 à la BMVR L’Alcazar, dans le cadre du cycle Explorations post-coloniales

Rens. 04 91 62 46 30 / www.cinememoire.net