Les toits de Paris – (France – 1h38) d’Hiner Saleem avec Michel Piccoli, Mylène Demongeot, Maurice Benichou…
Larme à gauche
Quand on a dépassé l’âge d’être productif et indépendant, quand la vie sociale se résume aux banalités quotidiennes, on entre dans la salle d’attente de l’ultime trépas plus vraiment actif pour vivre, mais encore suffisamment pour ne pas mourir. Les toits de Paris traite de la solitude et de la déliquescence des rapports entre les hommes, vaste sujet qui, comme vous pouvez l’imaginer, ne laisse guère de place à la légèreté. Ce qui intéresse ici le réalisateur, c’est l’étude d’un microcosme en marge, d’individus qui vivent dans des bulles hermétiques au monde qui les entoure, sortes de fantômes cachés et hors du temps. Pour appuyer son propos, les personnages apparaissent le plus souvent en gros plans, excluant du même coup tout ce qui les entoure, renvoyant chacun à sa triste solitude. On est même gêné par cet excès de didactique lorsque le film use (et abuse) de plongées qui semblent littéralement écraser les personnages, les couchant précocement sur cette terre marâtre qui ne va pas tarder à les reprendre. Même observation quant à l’utilisation spasmodique, et c’est un euphémisme, des dialogues : ne pas parler, c’est déjà ne plus vivre. Les quelques velléités poétiques du film nous apparaissent ainsi noyées sous un déluge de pessimisme devant lequel même l’amour semble impuissant. Les beaux moments de tendresse entre Piccoli et Demongeot nous laissaient pourtant présager du contraire ; l’anéantissement des caresses nous prépare souvent à la dissolution éternelle… Erreur de lecture, Hiner Saleem choisit une autre issue, et on reste finalement presque insensible à la vue de ce corps qui va être consumé dans la mort sans l’avoir été dans l’amour.
nas/im