L’Interview
Jango Edwards
A l’occasion de sa venue au Théâtre Nono dans le cadre du festival Tendance Clown, le « King of Fools » s’est prêté au jeu de l’interview. Avec tout son sérieux, ou presque.
Vous vous qualifiez de « bouffon professionnel ». Qu’entendez-vous exactement par là ?
J’ai dédié ma vie à la comédie, à son étude, et je me dévoue à l’art clownesque. Ce n’est pas un métier mais un style de vie, une religion du rire appelée « l’Eglise de la Grimace », un mouvement international, le Nouveau Clown.
Vos créations tiennent du cabaret, du mime, du burlesque… ce sont là vos influences ?
Être clown témoigne d’une réflexion sur le monde qui nous entoure. Les influences sont partout, et particulièrement dans la vie quotidienne. Je regarde le monde autour de moi. En réalité, je tiens la majeure partie de mon inspiration des clowns eux-mêmes, classiques comme contemporains, et des comiques que je vois dans des films, sur Youtube… Il n’y a rien de complètement nouveau en comédie, juste de nouvelles interprétations et représentations de la richesse du genre, à partir d’une base traditionnelle.
Vous sentez-vous plus proche du joker de Batman, du mime Marceau ou de Buffo ?
Je porte quelque chose de chacun d’eux. Mon but est de communiquer avec chaque membre du public, individuellement. Tout est bon pour passer le message, des styles différents : techniques, costumes, mime, pathos, parodie, nez rouge… Un clown se doit d’être flexible, de s’adapter à son public.
Le spectacle que vous présentez dans le cadre du festival Tendance Clown à Marseille est un duo avec Cristi Garbo, avec laquelle vous travaillez depuis une dizaine d’années. Comment vous êtes-vous rencontrés ?
J’ai rencontré Cristi en juillet 2004, au forum international des cultures à Barcelone, avec vingt autres acteurs internationaux. Depuis, elle est devenue une grande star comique en Espagne. On s’entraide pour nos spectacles et on joue souvent ensemble pour des duos classiques — The King and Queen of Fools.
Comment différencier le clown contemporain d’un humoriste ?
Un clown ne cesse jamais d’être un clown ; il a besoin d’aider les gens à rire, pas seulement du haut de la scène. Le clown se souvient de la simplicité et de la naïveté d’un enfant. La vie privée et publique d’un clown sont constamment mêlées. Quand je joue le clown, je suis clown, et vice versa. Et, à la différence des humoristes, n’oublions pas que le clown rit, mais est mauvais au lit !
Vous dites que les premiers rangs de vos spectacles feraient bien de venir en cirés. Comment expliquez-vous ce mélange entre la peur d’être éclaboussé et le plaisir de voir les autres aspergés ?
J’ai dit ça ? Peut-être. Je me souviens avoir tendu des impers au public avant une lecture sur le temps. J’avais appelé ça Jango School of Tension. Le comique réside quelque part entre l’angoisse d’être touché et le soulagement de cette tension, quand tu réalises que quelqu’un d’autre a pris à ta place.
Charlie Chaplin disait que quand on voit quelqu’un tomber de loin, on rit, mais quand on voit quelqu’un tomber de près, on a mal. Vous riez dans les deux cas ?
En tant que clown, tu apprends par expérience jusqu’où tu peux aller avec des gens en particulier, ou des foules. Tu peux choquer et effrayer un public, les faire rire, de près ou de loin, mais tu as besoin d’un sens aigu des limites. Il existe une frontière imperceptible, qui avance ou recule.
Pour finir, Ooopartoufrapizckif zoukiiiiiip narchrrrr AAAiiiiip pirikikikkkk plooof zuuuuf ?
Pour citer le célèbre Snozze Bros : « Zappady doo da »
Propos recueillis par Adèle De Keyzer
Jango Edwards – 40 Years of Entertainment : le 18/05 au Théâtre Nono (35 Traverse de Carthage, 8e), dans le cadre du festival Tendance Clown.
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