Festival ZinZan aux Baux-de-Provence et au Village d’Orgon
Voler de ses propres Z
Dans des cadres somptueux, entre pays arlésien et massif des Alpilles, voilà sept ans que le festival ZinZan tord le cou aux clichés les plus coriaces en faisant vivre les musiques et danses populaires occitanes avec une aisance déconcertante. Un véritable laboratoire ouvert à tous, de jour comme de nuit : entre concerts et balètis, stages de chant, de violon d’Auvergne, de vielle ou de bourrée, expositions de lutheries et autres « bidouilleries » fascinantes, c’est le futur qui tape à la porte.
« Les cultures régionales ont souvent été ridiculisées par des milieux culturels qui se veulent être l’élite. Ils sont soutenus par un pouvoir politique centralisateur qui ne veut pas voir émerger des foyers de pensées indépendantes ; soutenus également par les marchands qui veulent un consommateur simple et docile, qui achète ce qu’on lui vend et ne diversifie pas les objets à produire. Le folklore a été un outil de cette réduction de la vraie culture à des “us et coutumes du passé”. On qualifie de passéiste, conservateur, voire réac, celui qui s’intéresse à cette vraie culture ; on en fait quelque chose d’anormal… C’est difficile de déconstruire cette image et d’échapper à la tentation de résistance par repli. ZinZan est un des moyens pour nous de désamorcer ces faux discours véhiculés par les pouvoirs politiques et les médias en général. C’est la possibilité pour plein de gens de se rencontrer dans un espace temps convivial, autour de la musique, de la danse, de la gastronomie, du patrimoine et de comprendre que tout est lié par la culture, la vraie, la leur. Pas celle qu’on leur sert le matin dans des campagnes de pub et le soir au JT d’une ou l’autre télé centralisée vide de sens et de culture. »
Inutile de paraphraser l’infatigable Henri Maquet, musicien et membre de l’équipe fondatrice… N’y allons pas par quatre chemins : l’histoire de France est plus complexe et colorée qu’elle n’y paraît dans les discours dominants. Et, contre toute idée reçue, les formes artistiques de ses territoires font preuve d’une impressionnante vitalité. Le fruit d’une véritable multiplicité des savoirs, des vécus, de cultures différentes les unes des autres, et complémentaires, avec leurs langues, leurs instruments et leurs formes créatrices populaires donc (oui, comme partout ailleurs dans le monde — ce que tout le monde semble paradoxalement apprécier chez les autres). Il semblerait pourtant que persiste encore une sorte de tabou lorsque sont évoquées, entres autres, les musiques dites traditionnelles de l’intérieur. Et, outre le fait qu’il n’y ait de conservatisme que dans les esprits conservateurs, l’incompréhension de certains laisse aussi bien souvent place à la raillerie, une façon comme une autre de contourner le sac de nœuds.
Pourtant, « le trad connait sans cesse des “renouveaux”. Il trouve des nouveaux publics, des nouveaux contextes, de nouveaux artistes vecteurs de son expression. On a vu apparaître ces dernières années des spectacles autour de la danse, du VJ de collectages, l’électrification de certains instruments, l’association d’effets électroacoustiques, l’emploi de séquenceurs… mais aussi la restauration d’instruments anciens, et surtout la restauration de leur pratique, de nouveaux luthiers qui proposent des instruments différents… Il y a un gros engouement du côté des bals. »
Chaque culture est à l’image de ce que l’on en fait à travers le temps, et de la façon dont on l’incarne. A l’équipe du ZinZan de dessiner la sienne, ouverte aux quatre vents, et de faire découvrir au public ce que l’on range sans y réfléchir vraiment dans le tiroir méconnu (et trop souvent mal interprété) de la « tradition ». Il s’agit pourtant aujourd’hui de mieux comprendre, de savoir et d’acquérir de nouvelles cartes pour entériner l’uniformité, et faire évoluer des pratiques artistiques (souvent plus enviées à l’étranger que sur leurs propres territoires historiques) véritablement passionnantes. La programmation de cette septième édition est encore une fois composée aux petits oignons, et adaptée aux circonstances : à la danse (« exprimant ce que les mots ne peuvent plus dire ») d’abord, aux têtes d’affiches (Lo Còr de la Plana, Rit, Jéricho, Jean-Louis Ruf-Constanzo, Tribal Jâze, Très, El Pulpo…) bien sûr, mais aussi à des rencontres et autres formations aussi spontanées qu’imprévisibles tout au long de la journée. Car ces musiques ont cela de fascinant : elles ne connaissent aucune frontière.
Jordan Saïsset
ZinZan : du 21 au 24/08 aux Baux-de-Provence et au Village d’Orgon.
Rens. : 06 65 61 68 79 / www.zinzanfestivalconcerts.sitew.fr
Rens. : 06 65 61 68 79 / www.zinzanfestivalconcerts.sitew.fr