L’île fantastique
On imaginait qu’avec les coupes budgétaires post-Capitale, l’année culturelle serait proche du néant. Mais force est de constater que chacun tente, bricole, invente. Ou mieux encore : se renouvelle. Localement parfois, se réajuste, souvent… Et le festival MIMI ne déroge pas à la règle.
Comme à l’accoutumée, si le festival est maintenu, le directeur Ferdinand Richard introduira les divertimentos nocturnes par un discours sur la société du spectacle. Et ça tombe plutôt bien… En tout cas, on attend un patron de messe particulièrement remonté à l’encontre d’un gouvernement qui n’a absolument rien de socialiste. Si la politique donnera le ton, MIMI reste avant tout une aventure musicale.
Début des hostilités à l’U.Percut, en compagnie de Postcoïtum. Le duo loufoque balance sans condescendance un bouillon sur-rythmé et surprenant, empruntant un chouïa au free jazz, glanant un gros paquet d’électronique ou s’enivrant avec deux doses d’expérimental. Dans la foulée, un autre duo tout aussi déglingué, bien connu en ces pages : Sugarcraft, volant aux confins d’un punk new-wave à l’aide de costumes folk-dingues. Le lendemain, on ne croira que ce que l’on verra : Camel Zekri, petit-fils de Hamma Moussa de Biskra, prince touché par la grâce gnawa, nous invitera à une transe organique en compagnie d’une kyrielle de musiciens de renom, techniques et uniques (Okba Soudani, Ahmad Compaoré…). Dans la foulée, Josephine Foster… du folk. Rien à voir a priori, sauf qu’elle voyage dans des contrées psychédéliques improvisées.
Embarquons enfin pour le Frioul. Direction l’Hôpital Caroline, avec Maryam Saleh et Zeid Hamdan, ou la rencontre entre le Liban et l’Egypte, qui se solde par un match agité entre chants arabes, électro et hip-hop. Dans la même soirée, pour rester dans le rythme, DakhaBrakha livrera un instant poupées slaves : une multitude de percussions et des diables en boîtes… Tout aussi puissant que la venue de l’inusable Suicide. Quarante ans après leur formation, ils napperont l’île de leurs disharmonies new wave gangrénées et toujours au bord de l’étouffement. En marge, juste avant, le trio franco-bosniaque, minimaliste et bruitiste de Sevdah mon amour, comme un melting pot rugueux fait de mélancolie et d’intentions martelantes. Et pour finir en beauté, encore une histoire de revenants : Richard Pinhas, pionnier de la scène expérimentale française, et Etienne Jaumet, moitié synthétique du groupe Zombie Zombie, dévoileront une fois encore leur grande perception cosmique mâtinée d’ambient stratosphérique. A noter, pendant tout le festival, la présence de la djette marseillaise Pacific Princess, aux sets oniriques de circonstance. Estivaux et exigeants.
Lionel Vicari
MIMI : du 2 au 6/07 à Marseille.
Rens. : www.amicentre.biz