Scènes de bêtes
Jeune artiste autodidacte au talent incontestable, Cœur expose son bestiaire sur les murs de la Road Art Gallery. Des animaux de papier aux regards intenses, fascinants.
« Quand on parle de peinture animalière, on imagine le tableau d’un teckel au-dessus du canapé de mémé, c’est super ringard à la base. Moi, j’aime bien transformer ce côté ringard en y ajoutant une touche perso. » Ainsi Cœur, alias Thibault Jandot, résume-t-il en quelques mots son travail. Et une fois que l’on a fait connaissance avec ses gorilles, chiens, poules et autres taureaux, on ne peut que lui donner raison. Son coup de pinceau est vif, quasiment ciselé, avec un côté très graphique hérité de ses premières amours pour le graff. On est immédiatement saisi par l’impression de mouvement et le regard très intense de chaque animal. Ce ne sont plus de simples peintures ; Cœur réussit à leur donner véritablement corps. La tendresse qu’il porte à ses modèles transparaît dans chaque toile, sans que cela soit pour autant le but recherché, comme une cerise sur le gâteau de ses expositions. « Peindre des animaux s’est en quelque sorte imposé à moi… Je ne peins bien que ce que j’aime, mais je n’ai pas l’audace de penser que je peux influencer mon public et lui faire ressentir une émotion en particulier. » De même, les costumes dont il affuble depuis des années les protagonistes de son bestiaire n’ont rien à voir avec un quelconque message, davantage avec une envie de contemporanéité. « Je crois que la modernité est salvatrice pour la peinture, que ça lui apporte une touche d’intérêt en plus. Ces costumes, c’est ma touche perso, j’aime aussi l’effet que ça donne, ça change notre perception de l’animal, ça l’humanise d’une certaine manière. » C’est peut-être là que réside toute la beauté de sa peinture, dans ce côté moderne et hyper réaliste qui nous amène à chercher le regard de ce berger allemand mélancolique ou à rendre son sourire à ce gorille légèrement moqueur.
Aileen Orain