Barnum au Petirama
Tournez méninges
A la fois hommage à l’inventeur de l’industrie moderne de la fête foraine, Phineas Taylor Barnum (1810-1891), et démonstration de la créativité émergeant des Ateliers de la Cité, l’exposition Barnum joue paradoxalement la carte du minimalisme.
D’emblée, le visiteur est pris de court. Dans la première salle s’alignent d’étranges bâches noires au mur tandis qu’une construction de bois trône dans un coin. Au sein du chapiteau boisé, un chemin incurvé, encadré par deux miroirs, donne l’illusion de se retrouver dans un labyrinthe forain de verres. Entre réminiscences de l’enfance et abstraction, on marche sur un pont suspendu entre art contemporain et fête foraine, thème de l’exposition.
La plus célèbre des encyclopédies en ligne définit la fête foraine comme un « rassemblement itinérant (ou revenant à date fixe) en plein air de forains indépendants. Elle regroupe des attractions et des manèges ainsi que divers stands (jeux de tirs, vente de friandises). » Si dans ces conditions, le rapport entre fête foraine et art contemporain ne coule pas de source a priori, la poursuite de la visite apporte quelques éclaircissements. Comme face à une porte dérobée dans un train fantôme, il faut contourner la cabane de bois et de courbes pour découvrir une deuxième salle qui, justement, rend hommage à cette célèbre attraction. Un balayage de lumière zoome avec parcimonie sur des installations dans la pénombre. Seuls les cris des visiteurs manquent. Ici, fini de jouer, il est temps d’observer. Malgré ou grâce au manque de lumière, la vision et l’imagination du visiteur s’éclairent finalement : il s’agit en fait d’un freak show d’œuvres d’art. Le regard se porte tour à tour sur un basketteur géant au corps de bateau pirate, un mécanisme horloger suspendu à une balançoire qui fait du hula hoop avec un cercle en acier sans se fatiguer, ou encore quelques créatures simiesques à tête d’hippopotame qui n’hésitent pas à montrer leurs difformités. Comme Barnum, Sextant et Plus, organisatrice de l’exposition, attire le public grâce à une fine supercherie : en venant pour l’art contemporain, il repart avec des œuvres foraines et… vice versa.
Guillaume Arias