Le festival Reevox
Bandes à part
Le festival multidisciplinaire, contemporain et électronique Reevox souffle ses quatre bougies avec une édition en forme de laboratoire. Visite des lieux.
On ne vous refera pas ici l’histoire des usages de l’électronique et de son attachement viscéral aux arts contemporains. Même si l’on ne peut s’empêcher, en parcourant de la programmation de l’événement, jusqu’au nom lui-même, d’en référer aux papes de la musique concrète… Le fait historique est important, car il n’est pas ici vraiment question de rupture : « Je déteste les chocs, les révélations, les émerveillements. On découvre quelque chose que l’on ne comprend pas, puis un jour on le comprend… Si l’on s’intéresse à quelque chose et qu’on le travaille, on va le développer. Mais la question est de savoir ce que l’on comprend, comment on l’intègre, et comment cette chose que l’on a intégrée peut accompagner notre vie. » Ainsi, le directeur du GMEM Christian Sebille nous éclairait-il en ces pages sur sa façon d’envisager la continuité du geste musical, celui qui s’inscrit dans le processus d’un parcours de vie, empli d’étonnements : « Il faut redoubler d’efforts pour essayer de persuader ceux qui sont si pauvres, tristes et malheureux qu’ils ne parviennent plus à s’étonner. » C’est probablement là, dans l’étonnement, qu’il faudra chercher le fil conducteur de ce festival hybride. Et aux travers, cette volonté de rassembler des générations et des milieux aux limites sociales malheureusement bien souvent trop tranchées. Plus d’un se souviendra de cette heureuse rencontre entre Arnaud Rebotini et Christian Zanesi, entre la techno analogique et l’expérimentation concrète, dans un Cabaret Aléatoire transformé en lieu de vie trans-générationnel. Une réussite, comme un clin d’œil à cette frange d’enfants de la pop culture désireuse de reconnaître ses liens de parenté avec les sphères avant-gardistes du siècle dernier. Et comme si le voile se levait chaque jour un peu plus sur ce rhizome infini qu’est l’histoire de la musique. Guitares préparées, tabla, laptops, disques durs et magnétophones à bande… les outils convergent, la matière se cherche et les pratiques se retrouvent enfin.
Jordan Saïsset
Le festival Reevox, du 27 au 31/01 à Marseille et Aix-en-Provence.
Rens. : 04 96 20 60 10 / www.gmem.org
Toute la programmation du festival Reevox ici
La sélection de Ventilo
Mathias Delplanque
> le 28/01 au GRIM
Artiste aux multiples identités, Mathias Delplanque se produira sous son vrai nom lors de l’événement Chutes, qui reprend des compositions de son dernier opus, offrant au public une expérience immersive et lente, où s’enchainent des sons hétéroclites comme autant d’échantillons de créations sonores distinctes, de « chutes » de ses morceaux de musique. S’ensuivra une prestation aux côtés de Philippe Foch avec son projet Taarang : un ensemble de tablas (percussions indiennes) accompagné par des sonorités électro-acoustiques permettant la confrontation et le croisement de deux univers musicaux opposés, alliant ainsi tradition et modernité, répétition et improvisation.
Jean-François Laporte & Virgile Abela – Inner Island
> le 29/01 à 21h à Seconde Nature
L’artiste protéiforme canadien Jean-François Laporte se produira en duo avec Virgile Abela au cours d’une performance atypique et immersive de noise spectrale conçue autour de nouvelles lutheries et de surfaces tactiles de contrôle du son créées spécialement pour le projet. Les deux artistes livrent une composition minutieuse et minimaliste, inscrite dans la durée et écrite pour le lieu où elle se joue. En prolongement du concert, l’installation audio-visuelle Electric-Qi présente des instruments récemment conçus : tubulaires et surmontés d’une led blanche, ils permettent une expérience d’exploration inédite sous la forme d’une sorte de paysage sonore et lumineux à investir.
Carole Rieussec
> le 30/01 à Klap
Au sein du duo Kristoff K.Roll, la compositrice Carole Rieussec travaille sur une musique de l’instant, improvisée et alimentée par des sons issus du quotidien, révélant parfois l’étonnante et ténue musicalité des objets qui nous entourent. Le second travail de l’artiste amène une interrogation sur le corps et sa musicalité puisque sa partenaire et chorégraphe Clara Cornile promène sur la scène, par le biais d’un haut-parleur, les voix de dizaines de femmes ponctuées par des sonorités acousmatiques, formant de fait un canevas sonore fragile et sensible…
Beatriz Ferreyra & Christine Groult – Revox experience
> le 30/01 à Klap
A l’instar du projet Taarang, les deux compositrices travaillent elles aussi sur la confrontation de deux types de créations musicales puisqu’elles marient les sonorités d’instruments récents de lutherie électronique et celles, plus analogiques, de quatre Revox® (des magnétophones à bande). Au-delà de la rencontre de deux pratiques, ce sont deux conceptions de la création musicale qui se rencontrent : Beatriz Ferreyra aborde le son créé par le Revox® comme une matière à sculpter, tandis que Christine Groult utilise des interfaces de programme qui vont eux-mêmes transformer le son. Le tout forme un ensemble étonnement harmonieux qui s’invente progressivement de manière atypique et poétique.
Rone + Aufgang + Postcoïtum
> le 31/01 au Cabaret Aléatoire
La soirée de clôture sera certainement animée puisqu’après une mise en bouche par le duo post-rock Postcoïtum, on verra se produire sur scène les étonnants Aufgang (pour une présentation de leur nouvel opus à paraître) : composé d’un batteur et d’un pianiste, le groupe mêle musiques classiques et électroniques de manière résolument contemporaine, créant des morceaux à la rythmique prononcée et aux mélodies travaillées. Et pour parfaire la soirée, le musicien Rone (dont le nouvel album, Creatures, devrait sortir le mois prochain) mettra le feu aux poudres avec un live électro/pop/minimal hypnotique.
Estelle Wierzbicki