Vader - Peeping Tom © Christophe Coënon

Vader au Théâtre du Merlan

Au vieux de sa forme

 

Sous couvert d’un spectacle fort en prouesses physiques et en émotions, la compagnie Peeping Tom évoque de manière réaliste la vie en maison de retraite. Une pièce où la danse devient une métaphore de l’unicité de la vieillesse et du respect qu’on lui doit.

 

Personne ne souhaite, a priori, occuper sa fin de vie dans une maison de retraite. Les images véhiculées par les faits-divers restent sombres à cet égard, le roman y situe parfois même le crime comme chez Agatha Christie (Mon petit doigt m’a dit) et les comédies sur le sujet sont bien rares au cinéma (Quartet). Lorsque le rideau se lève sur Vader, l’influence du Septième art se fait d’ailleurs sentir. Sol rouge contrastant avec des tables drapées de blanc, premiers dialogues étranges en anglais, fausses notes de non musiciens, difficultés du personnel pour enlever le manteau d’une visiteuse… Nous pourrions autant être au Grand Budapest Hotel (Wes Anderson) qu’au Great Northern Hotel de Twin Peaks (David Lynch).
Tout au long de la pièce, les spectateurs oscillent entre amusement et tristesse, voire angoisse. Probablement parce qu’il s’agit là d’une manière d’exprimer nos sentiments face à ce « naufrage » qu’est la vieillesse. Peeping Tom ne cherche pas à nous leurrer : la vie n’est pas facile en maison de retraite. Ironie du sort, c’est aux plus vieux comédiens de nous l’enseigner sur scène : remontrances d’un fils à son père, absence d’autonomie pour la toilette, chapardages, infantilisation des pensionnaires, tout y passe. Outre l’originalité d’associer tous les âges, toutes les langues étrangères et tous les clichés sur la vieillesse, la plus grande trouvaille de Vader réside dans le langage dansé qui mène systématiquement un double jeu. D’un côté, les mouvements des jeunes danseurs, saccadés et rapides, traduisent en même temps les méfaits de la vieillesse sur le corps, la force physique de la jeunesse, mais aussi la difficulté à mimer un âge avancé. D’un autre côté, quand la danse se fait à genou ou en rampant entre les vieux pensionnaires qui déambulent ou passent le balais, on peut y lire tout autant une métaphore de l’invalidité qu’un appel au respect envers nos aînés, les comédiens âgés étant, eux, bien debout dans ces moments-là.

Guillaume Arias

 

Vader était présenté du 18 au 21/03 au Théâtre du Merlan.