Traces. Fragments d’une Tunisie contemporaine II au MuCEM
Impressions, soleil couchant
Les seconds fragments de l’exposition Traces poursuivent au MuCEM la découverte de l’art tunisien contemporain.
Après le premier volet de l’exposition présenté l’an passé, Traces II continue d’interroger notre regard sur la Tunisie. En lien avec Traces I, quatre nouvelles plaques de verre du premier photographe tunisien, Abdlehak El Ouertani, datant de 1895, sont aujourd’hui présentées. Elles offrent avec émotion et silence le visage de monuments et de regards figés dans le temps.
Autres monuments, autres espaces : Faten Gaddes donne à voir l’usine de la STEG (Société tunisienne d’électricité et de gaz) située au cœur de Tunis et disparue depuis. Machines à l’arrêt, couleurs bleues ou rouges et silence de la poussière caractérisent ce lieu que la photographe nomme d’ailleurs « La bête déchiquetée ». Dans une autre image, elle montre la statue de Bourguiba reléguée à l’époque par Ben Ali dans le quartier de la Petite Sicile, entre chantier et bétonnières. Des espaces véritablement bouleversés, qui laissent entrevoir un nouveau futur…
Le couple de plasticiens Wadi Mhiri et Houda Ghorbel met en scène le temps familial à travers sa vidéo Perles de famille. Une main caresse des graines de semoule. Derrière, dans ce mouvement lent et sensuel, apparaissent des rituels familiaux de vie : la naissance, la circoncision, les mariages, telles des traces du passé qui s’entrecroisent et revivent aujourd’hui.
Autre rituel, religieux celui-là, présenté par Augustin Le Gall. Sa série Le Dernier Arifa. Petite histoire du monde invisible. 2013 met en scène le dernier Arifa de sa génération (personnage central du culte stambali), Riadh Ezzawech, transmettant aux humains la puissance et les bienfaits des djinns (créatures surnaturelles liées aux croyances de tradition sémitique). Les superbes tirages en noir et blanc montrent un personnage aux identités multiples et surnaturelles, dont le regard aspire le spectateur.
Les images de Wassim Ghozlani clôturent ce voyage tunisien. La révolution apparaît en noir et blanc dans les gestes et les regards. Gestes violents, de rage et de courage, de ces femmes manifestantes, regard vers l’ailleurs de cet homme isolé tenant un drapeau tunisien. Plus qu’un symbole.
Carole Filiu Mouhali
Traces. Fragments d’une Tunisie contemporaine II : jusqu’au 29/02/16 au MuCEM (Esplanade du J4, 2e).
Rens. : 04 84 35 13 13 / www.mucem.org