Vidéos à la demande
Si le festival des Instants vidéo numériques et poétiques parcourt plusieurs villes de France et plusieurs pays en cherchant à en abolir les frontières, il se déploie tout particulièrement à Marseille dès le 29 octobre avec une programmation prometteuse…
La singularité de ce festival est liée en partie à la volonté de montrer la vidéo comme une pratique artistique multiforme, en lui préférant le nom de « poésie électronique » et en mettant en avant la diversité de ses expérimentations et de ses productions : diffusion de vidéos (regroupées selon un ensemble de thèmes), installations vidéo et numériques, concerts-performances où se mêlent corps, images et sons. Une journée (le 7 novembre) sera notamment consacrée à son histoire, sa genèse — le rapport entre télévision et vidéo — par la présentation d’une émission de télé belge (Vidéographie) qui a produit et diffusé pendant dix ans des œuvres vidéo expérimentales. La visibilité et la conservation des œuvres multimédias seront quant à elles interrogées par la présentation du projet Gama (un portail des archives des arts multimédias). Par ailleurs, la programmation affirme sa dimension internationale en montrant cette année des œuvres en provenance de cinquante-cinq pays, tout en donnant les moyens aux spectateurs et aux acteurs d’interroger le sens d’une telle rencontre entre des visions et des cultures différentes, et le sens des notions de territoire et d’origine envisagées ici sur un mode dynamique. L’installation vidéo et sonore de Jean-Paul Labro, La casa de John Doe, présentée à La Compagnie, interroge justement le lieu, l’habitat et l’habitant en mettant en œuvre une tension entre l’instabilité fondamentale du lieu où l’on vit et les valeurs de propriété et d’architecture solide.
Ainsi, la mise en œuvre d’une dynamique de liaison et d’union entre ce qui diffère est notamment au centre de cette vingt-et-unième édition : entre les espaces, les cultures, les sensibilités. Le deuxième Congrès des artistes non alignés (sur les critères du marché et du monologue culturel), qui aura lieu à la Friche de la Belle de Mai du 6 au 11 novembre, s’inscrit dans cette perspective en aménageant des rencontres étonnantes. Le moment fort de ce congrès (le 9) place Dionysos, ce Dieu de l’excès et de l’ivresse, et la corrida au centre des événements proposés : tous deux fonctionnent comme des références au processus de montage et d’assemblage qui guide la pratique de la vidéo, mais aussi comme dynamique de liaison entre les différents acteurs rassemblés pour l’occasion : artistes, viticulteurs de Banyuls, un journaliste spécialisé dans la tauromachie… Cette manifestation entièrement gratuite et libre d’accès affirme ainsi sa volonté de rompre avec l’ordre établi de la domination, c’est-à-dire avec une certaine distribution des corps, une configuration de l’espace, un mode du visible et du dicible, une organisation du faire, en tentant de les défaire et de les recomposer ensemble plus librement.
Elodie Guida
21es Instants Vidéo. Du 29/10 au 9/12 dans divers lieux de Marseille.
Rens. 04 95 04 96 24 / www.instantsvideo.com