Une chance aux tirages
Dans le Var et désormais à Marseille, le festival Photomed dévoile une programmation particulièrement riche qui, cette année, s’égrainera de lieu en lieu et de ville en ville jusqu’à la mi-août.
Le 17 mai dernier, entre les cimaises, on entendait l’approbation des visiteurs de la Villa Méditerranée qui, malgré le vertige, étaient venus pour l’ouverture du festival Photomed. « Ils sont beaux, ces tirages », pouvaient-on entendre et, en effet, les tirages réalisés par les studios Aza et Central Dupond Images sont superbes. Guillaume de Sardes, commissaire de l’exposition et programmateur du festival, ne manquait d’ailleurs pas de le souligner et de citer ces deux partenaires historiques du festival lors de son discours inaugural. Ses premiers mots furent néanmoins pour Soraya Amrane, la co-curatrice de cette exposition, « qui, bien connue des Marseillais, a déjà fait beaucoup ici pour la scène de la photo contemporaine. » Sans elle, cet accrochage aurait été privé de deux de ses joyaux, Maude Grübel et Franck Déglise, qui portent l’une et l’autre un intense regard photographique sur la ville d’Alger et sur l’Algérie. Une « traversée sensible des villes méditerranéennes », c’est d’ailleurs le thème de cette édition.
Photomed s’offre cette année une place de choix en s’établissant à Marseille. Le festival s’ancre ici dans une métropole qui a le double avantage d’être une grande ville et d’être éminemment méditerranéenne. Des expositions sont programmées à La Friche (Giasco Bertoli, Hicham Gardaf, Yves Jeanmougin, Joe Kesrouani, Anne-Françoise Pélissier), au Frac Paca (Antoine D’Agata), au Mucem (Bernard Faucon) et à la Villa Méditerranée (Franck Déglise, Sirine Fattouh, Maude Grübel, Alain Gualina, Hervé Guibert, Sebla Selin Ok, Mickael Soyez). Photomed n’oublie pas non plus ses racines et reste présent sur son lieu de naissance, à Sanary-sur-Mer (Hélène David, Michaël Duperrin, Flore, Gérard Rondeau, Hans Silvester), et sur les lieux de sa prime jeunesse, Toulon (Bernard Plossu, Zineb Sedira) et l’Île de Bendor (Sophie Zénon).
Depuis 2014, une édition miroir se tient également au Liban, occupant aujourd’hui une place importante dans le paysage photographique du Proche-Orient.
Selon Guillaume de Sardes, « la photographie n’a jamais cessé d’entretenir un lien étroit avec la ville ». L’une et l’autre se sont développées de concert et les photographes, en pratiquant la première, arpentent bien souvent la seconde. Ce faisant, ils témoignent de leur époque. Ainsi, le travail percutant de Sirine Fattouh (lauréate du prix Photomed/Institut Français du Liban 2017) qui prend des vues de Beyrouth, témoignant par l’objectif de l’urbanisation « chaotique » et « incohérente » dont la capitale et son patrimoine architectural sont actuellement les proies.
« Le thème porte sur la ville et sur l’écriture. Cet accrochage à la Villa Méditerranée est aussi l’occasion rare de voir des tirages “vintage” d’Hervé Guibert, des tirages d’origine qu’on ne reverra pas réunis de la sorte avant un bon moment… » Le 13 août, au terme de l’exposition, les très beaux clichés d’Hervé Guibert repartiront chacun vers leur collections respectives pour, peut-être, n’être jamais réunis à nouveau… C’est donc le moment d’en profiter. D’autant que dans cet accrochage comme dans le festival, le travail d’Hervé Guibert occupe une place particulière en tant que photographe/écrivain, car il constitue un pont idéal entre Photomed et son nouveau partenaire, le festival littéraire Oh les beaux jours !. De la même manière, le film de Bernard Faucon, Mes Routes I, II et III, qui sera projeté en sa présence au Mucem, fait partie des deux programmations. D’une pierre deux coups, pourrait-on dire.
Frédéric Vaysse