35 rhums – (France – 1h40) de Claire Denis avec Alex Descas, Grégoire Colin…
Rhum de cerveau
Le problème avec certains auteurs, c’est qu’ils nous ont tellement habitués à l’excellence que lorsqu’ils nous livrent un film tout juste moyen, cela provoque en nous une terrible déception. C’est le cas de 35 rhums, dont on ne pourra pas vous dévoiler le sujet pour la simple et bonne raison qu’on a encore du mal à le cerner même longtemps après la projection. A défaut de déflorer ledit sujet, plantons le décor : la banlieue parisienne et ses immeubles tristes, le RER qui y circule, et Lionel, quinquagénaire taiseux, qui conduit ces trains de banlieue. Il vit avec sa fille, picole avec ses collègues de boulot, antillais comme lui, et demeure, invariablement, silencieux et impassible. Un tel mutisme finit par réduire le personnage principal à sa seule présence, son seul corps, unique élément du film auquel on peut prêter un peu d’attention et grâce auquel on reconnaît parfois le savoir-faire de la réalisatrice. Pour le reste, 35 rhums demeure aussi énigmatique que son titre, et on se demande quel est ici le propos de Claire Denis : la solitude post-moderne ? Le nouvel esclavage par le travail ? Les difficultés d’intégration ? Le film effleure ces quelques pistes sans jamais vraiment les suivre. De notre côté, nous assistons, circonspects, à ce défilé d’images dont la nécessité, mais aussi l’esthétique, finissent par nous paraître douteuses. Certaines vérités sont valables au cinéma comme au bar : 35 rhums, ça fait vraiment mal à la tête.
nas/im