Rosy Simas – We Wait in the Darkness © Ian Douglas

Festival Dansem 2017

Dans la chaleur de la nuit

 

Dansem fête ses vingt ans avec trois semaines de programmation et seize spectacles, sur Marseille, Vitrolles et Aix-en-Provence. Du Maroc à la France, de l’Italie à l’Espagne, en passant par les États-Unis, cette édition est l’occasion de retrouver des chorégraphes habitués des lieux, mais aussi de découvrir des artistes reconnus dans leur pays et un peu moins chez nous.

 

On n’a cesse de dire que la danse ne s’inscrit plus dans un projet de pas comptés, mais qu’elle explore tout azimuts ce qui se cache derrière les apparences. Une manière de déshabiller la forme pour mieux comprendre le fond. À la vision du formidable The Square de Ruben Östlund, primé à Cannes, on comprend mieux que le propos (le synopsis) peut déployer un écran de fumée qui baigne le spectateur dans une douceur ouatée, mais ne révèle finalement pas grand-chose de ce qui se cache derrière l’individu. La violence et les turpitudes du petit homme surgissent dans des situations extrêmes où l’homme redécouvre son caractère sauvage. Oui, la nature est violente et c’est pour mieux l’adoucir qu’on la rhabille et que l’on tente de l’apprivoiser dans une multitude de codes, à commencer par le langage. C’est là que réside la force de la danse, par cette faculté à désarticuler le corps pour lui faire dire des choses qui relève du brutal plutôt que du conscient. De cette main qui s’élève dans l’atmosphère, j’interroge mon origine et j’abandonne pour quelques instants l’actualité de mon quotidien. En invitant la chorégraphe amérindienne Rosy Simas, Cristiano Carpanini fait le choix de promouvoir une danse intime qui convoque les esprits, le passé et le présent, là où des ondes positives acceptent d’ouvrir l’espace pour que le corps se dénude et couvre le sol de son empreinte. Il reste l’odeur d’une présence qu’on respire le lendemain quand l’être cher nous a quitté. Loin du bruit de la compagnie et de ses corps qui s’assemblent sans fin pour nous dire des choses que l’on a déjà entendues. Dansem aime le particulier, les rapports en tête-à-tête, l’idée de prendre le temps de se revoir pour se dire des choses sur le coin de l’oreiller. Il existe une danse qui convoque ses origines, mais qui aime aussi entamer un dialogue avec les limites du corps, là où l’épuisement et l’acuité de la concentration éclate la bulle de l’ordinaire. Alessandro Sciarroni représente avec force l’idée qu’un même geste peut devenir une œuvre en soi. Mais il prend en compte le fait de se tromper, de recommencer, d’échapper à la dictature du synchrone, pour laisser un sourire poindre sur le bout des lèvres, ouvrant ainsi un espace de légèreté.

 

Karim Grandi-Baupain

 

Festival Dansem : du 21/11 au 16/12 à Marseille, Vitrolles et Aix-en-Provence.
Rens. : 04 91 55 67 76 / www.dansem.org

Le programme complet du festival Dansem ici