Le Prix Mourlot 2009 à la Galerie de l’ESBAM
En pleines formes
Quelques jours encore pour découvrir l’audacieuse sélection 2009 du prix de peinture Mourlot et le successeur de Christophe Boursault. And the winner is…
Longtemps, la peinture fut considérée comme une forme d’art surannée, cherchant sa place dans l’art contemporain. Il semblerait que cette interrogation soit une spécificité française, et que ni l’Allemagne de Gerhard Richter, ni l’Angleterre de David Hockney et encore moins les Etats-Unis d’Ellsworth Kelly n’aient jamais eu envie de la remettre en question, préférant se demander quelle peinture on avait envie de voir aujourd’hui.
En retenant des propositions aux antipodes les unes des autres, la sélection Mourlot 2009 semble avoir tenté de répondre à cette question. On pense aux Shaped Canvas d’Alexandra Roussopulos, objets informes aux châssis irréguliers, figurant des sortes de flaques flottantes, ou encore aux « dilutions » de Samuel Aligand, tortionnaire du plastique, qui opte pour de nouvelles matières, de nouvelles surfaces et propose de curieux paysages. Plus sobres, les tableaux de Jérémie Delhome font écho à la peinture métaphysique, présentant un objet non identifiable, où le fond et la forme se confondent. Tant par leurs couleurs que par leurs sujets dont émane une jubilation communicative, les pièces de Balthazar Leys pourraient illustrer la citation de Nietzsche, « L’art nous est donné pour ne pas mourir de la réalité » : avec des moyens ascétiques, le peintre « suggère », les pleins, les creux, les volumes et l’espace.
Enfin, la lauréate 2009, Amélie Bertrand, qui déclare chercher à penser à travers la peinture et non à peindre ce qu’elle pense, a séduit le jury avec une peinture figurative aux confins de l’abstraction. Des plans isolés rappellent les réseaux colorés de l’Américaine Sarah Morris, tandis que d’autres, surfaces vibrantes et cinétiques, font opter l’œil pour une solution optique ou son exact contraire. Les couleurs, saturées et posées en aplats, et les jeux de perspectives donnent lieu à des compositions géométriques abstraites et léchées, où tout est aseptisé, comme dans un monde virtuel. Les paysages d’Amélie Bertrand sont des écrins de la figure humaine absente…
Céline Ghisleri
Prix Mourlot 2009 : jusqu’au 11/04 à la Galerie de l’ESBAM – rue montgrand, 6e. Rens. 04 91 33 11 99