- • Pierre Malphettes – Sculptures terrestres et atmosphériques (Janvier > avril au FRAC PACA)
Il est assez rare de se souvenir de chacune des pièces d’une exposition. Six mois après sa fin, toutes celles de Pierre Malphettes au FRAC sont pourtant encore dans nos esprits : les nuages de verre, l’IPN sculpté au laser, les ventilateurs dans leur mouvement perpétuel… Dans une économie de moyens recherchée, l’artiste emprunte sa matière au monde industriel pour formaliser des phénomènes naturels. De cette alliance paradoxale naissent quelques œuvres rares et d’une poésie folle, parfaitement mises en valeur dans cette exposition fluide.
• Yasmine Blum – Monstroputes et acolytes (Avril au Lièvre de Mars)
En avril dernier, les fantasmes monstrueusement érotiques de Yasmine Blum s’affichaient sur les murs de la librairie le Lièvre Mars : ogresses obèses et obscènes, phacochères sadiques et pervers, toute une galerie d’êtres chimériques s’exhibaient dans des positions grotesques et humoristiques. La cruauté et la violence représentées sous un trait fin et délicat provoquaient malaise et jubilation chez celui qui regardait. « Personne ne m’avait dit que l’amour avait parfois ce visage, un monstre polymorphe et pas très courtois. »
• Julien Blaine – Un tri (Mai > septembre au [mac])
Julien Blaine est une passionnante personnalité artistique, un touche-à-tout (poésie, performance, arts plastiques…), un poète activiste comme on n’en fait plus. Imprégnée de dadaïsme et par l’esprit Fluxus, subtilement teintée de controverse, son œuvre a secoué les méninges des visiteurs du [mac], avec une rare finesse et beaucoup d’humour. Peut-être un peu « bordélique », sûrement trop longue et sans véritable parti pris scénographique, cette exposition doit tout à l’immense richesse de l’artiste mis à l’honneur.
• Jeremie Setton – Boxroom (Juin à la galerie CompleX)
La première boîte de la galerie CompleX investie par Jérémie Setton conviait à une expérience sensorielle et physique. Nous entrions dans le monde de l’artiste, truffé de références (littéraires, artistiques et personnelles) mais artificiel, dévitalisé car privé d’ombre — or, l’ombre n’est-elle pas l’apanage du vivant ? Au-delà du travail du peintre, il nous restait en sortant de la boîte quelque chose d’ineffable, plus une sensation qu’un souvenir. Pour ceux qui auraient raté le coche, l’artiste sera dès fin janvier aux Ateliers Boissons.
• Machinations (Septembre-novembre à Vidéochroniques)
Réunissant une douzaine d’œuvres autour d’un des thèmes fondateurs de la modernité artistique du XXe siècle, la machine, cette exposition a permis d’effectuer un voyage dans l’histoire de l’art en reposant des problématiques issues de son exploration, mais aussi dans l’histoire de l’humanité en interrogeant son statut, entre utopie et désillusion, aliénation et libération. De sa réalité physique à son pouvoir métaphorique, la machine s’est exposée sous toutes ses formes en jouant sur ses ambiguïtés.
• Norma Jeane – Sleeping beauty goes wild (Septembre-octobre à la Galerie de la Friche – programmation : Sextant et plus)
Marquées par une esthétique de la destruction de l’objet industriel et, plus largement, des systèmes internes au développement économique, les installations de Norma Jeane peuvent être expérimentées comme un parcours initiatique à travers les traumas d’une société en crise. Par un jeu d’opposition, elles sont traversées par une dynamique vitale qui repose sur l’activation de rituels fonctionnant comme « catharsis », délivrance de la possession et point de départ (réel, possible, utopique ?) du renoncement à l’intérêt personnel.
• Voyage sentimental 3 (Septembre > décembre au FRAC PACA)
Joli thème pour cette exposition élaborée « autour des caractéristiques sentimentales qui intéressent Sterne et que l’on peut résumer par les mots d’amour, de pitié ou de charité à l’égard de la souffrance humaine. » On entre peu à peu dans l’exposition comme on s’enfonce dans nos états d’âme, parcourant les salles sans jamais se défaire d’une mélancolie qui se révèle plus ou moins selon les œuvres… On retiendra notamment la vidéo de Bas Jan Ader et les tableaux tautologiques de Remy Zaugg, trop rare sur nos cimaises…
• Thierry Kuntzel – La peau (Octobre-novembre à la Compagnie, dans le cadre des Instants Vidéo)
Avec cette installation vidéo, le regretté Thieery Kuntzel nous invite à appréhender, par une vision extrêmement rapprochée, le défilement de différentes peaux — et par là même, à faire l’expérience d’une perception à la fois intime (le défilement s’apparente à une caresse) et impersonnelle (ces peaux expriment l’Etre humain et le visible dont elles font parties). La peau témoigne d’un récit, d’une histoire ; c’est une trace de l’existence, mais aussi un tracé, un trajet, une ouverture à autre chose qu’elle-même.
• De la Scène au Tableau (Depuis octobre au Musée Cantini)
David, Ingres, Degas, Füssli… Le musée Cantini n’a pas lésiné sur les moyens pour nous offrir une expo digne de la capitale, passionnante à plus d’un titre : son thème — les rapports entre théâtre et peinture — qui nous fait revisiter nos classiques, ses œuvres (des plus grands noms de l’histoire de l’art à des peintres plus confidentiels)… Si cet événement, que l’on peut revoir des dizaines de fois avec le même enthousiasme, préfigure Marseille 2013, cette capitale culturelle s’annonce sous les meilleurs auspices.
• Pierre Bourdieu – Images d’Algérie (Novembre-décembre au MUCEM dans le cadre des Rencontres à l’Echelle et des Rencontres d’Averroès)
Réalisées en pleine guerre anticoloniale, ces photos témoignent à la fois d’un état du monde et de la genèse du projet sociologique de Bourdieu, qui naîtra peu de temps après, motivé par cette immersion dans une réalité politique et sociale complexe. Si sa pratique de la photo n’obéit à aucun projet défini, la force de cette exposition est justement de structurer la présentation des images par des textes et concepts clés développés plus tard par le sociologue, en leur conférant ainsi une réelle valeur documentaire.