Sylvain Ciavaldini & Antonio Gagliardi – Same, same but different à la galerie Porte-Avion
Truculence et autres élucubrations poétiques
Truculente exposition à la galerie Porte-avion, où Sylvain Ciavaldini et Antonio Gagliardi font expo commune. Same same but different porte bien son nom, puisque les univers de chacun des deux artistes se confondent sans jamais ne faire qu’un…
Truculent : l’adjectif s’applique aussi bien aux œuvres qu’à leur propos et aux artistes eux-mêmes. C’est en effet avec le sourire que l’on parcourt l’exposition des deux compères, qui ont en commun la dérision et l’humour. La vidéo de Sylvain Ciavaldini en est peut-être l’exemple le plus évident, mais les résidences de luxe pour Bernard Lhermitte d’Antonio Gagliardi, coquillages agrémentés de terrasses et baies vitrées, n’ont rien à lui envier…
Au-delà d’une lecture jouissive, d’une facture proche de la BD, du cinéma, de la pub, du recours à la calligraphie flower power et tout ce qu’elle évoque, au-delà de la légèreté qui se dégage de l’ensemble de l’exposition se trame quelque chose de peut-être plus subtil. Les sculptures d’Antonio Gagliardi, structures fragiles, aériennes et d’une poésie infinie, dont les marches montent et descendent pour ne mener nulle part et dont les portes s’ouvrent sur le vide, évoquent « un beau n’importe quoi », à l’image du monde dans lequel nous évoluons nous-mêmes. Ce labyrinthe de l’absurde aux dimensions improbables, sorte de représentation « sisyphienne » d’un aquabonisme affirmé, semble nous dire qu’il vaut mieux en rire…
Sylvain Ciavaldini et Antonio Gagliardi sont en fait deux faiseurs de « plaisantristes » (1), deux poètes surréalistes. Coutumier du titre évocateur, du jeu de mot et du barbarisme, Sylvain Ciavaldini sacrifie volontiers le sens à la forme. La série des « machines qui ne servent à rien » (comme disait Jean Tinguely), formes hésitantes entre la sculpture géométrique abstraite, et les engins savants aux mécanismes loufoques d’un professeur un peu dingue, tout comme les Tentatives de formalisation et les Métamorphoses, traitent d’une préoccupation commune à tout les sculptures : la transformation de la matière brute en une forme esthétique et évocatrice, la traduction d’une idée par une forme dans l’espace. Quant aux peintures et aux dessins, s’ils relèvent d’une pratique proche de l’écriture automatique, s’ils rappellent les couleurs et le foisonnement d’un Fabien Verschaere et les phylactères d’une Lily Van der Stokker, ils se résument — et c’est loin d’être réducteur — à une expérience rétinienne qui fait sens…
Céline Ghisleri
Sylvain Ciavaldini & Antonio Gagliardi – Same, same but different : jusqu’au 30/10 à la galerie Porte-Avion (96 boulevard de la Libération, 1er). Rens. www.galerieporteavion.org
Notes- Pour reprendre justement l’expression utilisée par Gainsbourg dans L’aquaboniste[↩]