Manuel Pratt à l’Antidote
Acide essentiel
Tout est dans le titre. Avec Le silence des pantoufles est aussi terrible que le bruit des bottes, Manuel Pratt revient sur les planches en esprit libre, n’épargnant rien ni personne. Délicieusement subversif.
Parlons tout d’abord de l’homme : artiste libre, acrobate des sujets aussi subversifs que polémiques, le personnage a le verbe féroce et la verve véloce. Fraîchement remercié de France Inter (décidément…), persona non grata à la télévision, censuré, boudé mais jamais écœuré, Manuel Pratt fête ses dix ans de carrière sur les planches, le seul lieu où l’on puisse encore le voir et l’entendre. Metteur en scène, écrivain, acteur et humoriste, l’homme aux multiples facettes se revendique gentil, mais très politiquement incorrect. C’est un euphémisme ! Dans son dernier spectacle, tous les sujets se bousculent, de l’actualité, fraîchement décortiquée au gré de son humeur et parfois avec une improvisation mordante, à la politique, en passant par la religion et l’amour. Aucune langue de bois n’est autorisée, l’homme égratigne et chatouille nos cerveaux endormis, faisant tomber les burkas invisibles qui nous oppriment : le striptease s’opère et le rire exulte, salvateur et libérateur. Un moment de pur bonheur où l’on retrouve enfin une liberté de ton que l’on croyait perdue. A la question « Qu’a-t-on à notre époque vraiment le droit de dire ? », Manuel Pratt répond en faisant sienne la devise du regretté Pierre Desproges : « On peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui. » De ce moment précieux partagé avec un esprit grinçant qui fait tant de bien à l’âme, on retiendra également la rencontre avec l’homme, après le spectacle, en toute simplicité.
Pascale Arnichand
Manuel Pratt était à l’Antidote du 5 au 16/10