Damien Valero chez Saffir

Damien Valero chez Saffir

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Attraction/Répulsion

Jouant sur l’ambivalence des matières et des associations, la première exposition à Marseille de Damien Valero fascine tout autant qu’elle répugne. Une chose est sûre : elle ne laisse pas indifférent.

Avant le numérique, la vidéo, Damien Valero se bornait à la gravure, qu’il utilise à revers puisque presque toutes ses gravures sont des tirages uniques : aberration d’une technique de reproduction en série. Quoiqu’il en soit, l’artiste affectionne la technique et plus particulièrement le rendu si particulier qu’elle procure aux images. Il en explore toutes les possibilités. Les matières que l’on retrouve dans son travail (suie, résine, chocolat, paraffine…) jouent sur des ambivalences : celle du beau et du laid, de l’agréable ou du dégueulasse… Valero aime à nous fasciner par ses images tout en nous faisant grimacer de dégoût ou d’incompréhension.
L’exposition Chiasma s’insinue dans la galerie, les œuvres se fondent avec le mobilier et l’architecture de l’espace. Damien Valero ne se résout pas à occuper le White cube de Saffir, préférant opérer une occupation visuelle et sonore du lieu.
La première pièce que l’on découvre en entrant, Modulor, vidéo réalisée avec ses acolytes Jérôme Cognet et Jérôme Pougnant, représente une femme nue se mouvant sur des bruits de battements de cœur et de flux sanguin. Un corps en mouvement, à travers lequel on discerne l’architecture d’un édifice. Privé de sa peau, le personnage devient de fer et de verre, sa matière se transforme en une architectonique tout aussi constructive que décorative.
L’artiste aime mélanger les sensations. Il associe des images à des matières qui évoquent parfois les substances générées par le corps, notamment dans la série Corpus : des radiographies recouvertes de résine, dont le potentiel plastique a de forts pouvoirs évocateurs. Un sentiment morbide s’installe, autant lié à l’image de la radio qu’à la matière visqueuse translucide qui la recouvre. On pense aux peaux de Cronenberg dans La mouche ; l’image est aussi belle que rebutante de prime abord.
C’est d’ailleurs une maladie qui donne son nom à l’exposition : Chiasma est une photo prise par une infirmière lors d’un examen médical subi par Damien Valero lui-même. Les câbles rouges apposés sur son crâne font écho aux lasers, qui découpent, mais construisent en même temps les photos numériques de la série Laser, représentant des fragments de corps féminins. Le focus opéré sur les parties anatomiques peut à la fois les rendre monstrueuses comme chez Chris Cunningham ou magnifiques comme chez Ingres. Mais, isolés les uns des autres, un genou, un coude, un sein, deviennent des éléments de compositions pures qui entament la construction d’une œuvre totale, d’une structure, le corps, le bâtiment, l’œuvre d’art…

Céline Ghisleri

Jusqu’au 31/12 chez Saffir, galerie nomade (32 rue St Jacques, 6e). Rens. 06 03 40 76 92 / www.saffirgalerienomade.blogspot.com