Place aux Compagnies
En bonnes compagnies
Imaginée par la Distillerie et les structures culturelles de la Ville d’Aubagne, la manifestation Place aux Compagnies entend mettre en lumière la jeune création théâtrale régionale. Zoom sur la sixième édition.
Place aux Compagnies est né d’une réflexion collective avec les structures culturelles de la Ville d’Aubagne (le Théâtre Comoedia, la Médiathèque Marcel Pagnol et l’ex-MJC Escale Saint-Michel) sur le fait qu’une ville de 45 000 habitants devrait pouvoir mettre en dynamique la création, la production et la diffusion du spectacle vivant, pour que les compagnies locales aient une meilleure lisibilité, une constance de production et une perspective de diffusion plus importante sur la région. Pour cela, il y avait ce lieu de résidence à Aubagne, la Distillerie, qui pouvait réellement devenir un outil de travail, prendre une nouvelle dimension et conforter sa mission de lieu de fabrique pour les artistes régionaux. Au fil des ans, Place aux Compagnies est devenu un rendez-vous annuel reconnu sur le territoire local et régional, un point de repère incontournable du théâtre contemporain.
Conçu comme un espace d’accompagnement, d’échange et de réflexion sur la production et la diffusion (intervention financière, accompagnement technique, logistique, administratif et de communication) Place aux Compagnies a pour vocation de mettre le pied à l’étrier à des compagnies du spectacle vivant. C’est aussi pour le public l’occasion d’aller à la rencontre de spectacles en fabrication.
Cette année, le programme est toujours aussi riche, mêlant jeunes créateurs et metteurs en scène plus expérimentés, tous mus par le désir d’aller au bout de leur geste artistique.
Le premier spectacle que nous ayons vu, Les Fourberies d’Escarpine, par la compagnie La Grande Horizontale, mis en scène par Jonathan Bidot avec huit acteurs professionnels bien connus des plateaux régionaux et nationaux, fut un coup d’envoi puissant. Après une présentation de grande classe par le maître des lieux, Christophe Chave, qui réussit le tour de force de donner à chaque spectateur une visibilité sociale à la place de cette odieuse visibilité numérique qu’incarne le pass sanitaire, l’obscénité, le trouble et la dépense prirent possession du plateau comme une réponse pleine d’à propos à notre époque si consensuelle, médiocre et mortifère. Avec la joie comme principe de vie sans autre justification qu’elle-même, les huit acteurs d’Escarpine nous ont fait rire aux éclats mais aussi bousculé par rapport aux idées reçues de ce que doit être une représentation théâtrale, avec une volonté de réactiver quelque chose de perdu chez le spectateur. Car sous ce déluge de situations scabreuses, il y a comme un cri, une matière noire qui fait tenir ensemble la salle et le plateau, une « fureur de jouer » et une forte interpellation en direction du public consommateur de théâtre que nous sommes devenus. À la suite de la représentation, la discussion entre les artistes et le public s’est poursuivie tard dans la nuit.
Une deuxième sortie de résidence a été ponctuée d’un spectacle le 25, Le Dieu de la Fête par la compagnie Hesperos, récit d’une jeunesse élevée dans un monde de fantasmes qui déchante année après année. Le samedi 2 octobre, ce sera le tour de Looking for Quichotte par la compagnie L’Individu, mis en scène par Charles-Éric Petit (dont le texte e été sélectionné par la Comédie-Française), ou l’univers chevaleresque de Cervantes transposé dans celui du rock. Toujours le 2 octobre au Cercle de l’Harmonie, la compagnie Ma Voisine s’appelle Cassandre présentera une lecture théâtrale de Debout Payé ou le regard du vigile de Gauz, récit d’un étudiant ivoirien devenu vigile après avoir atterri sans papier en France, mise en scène de Nanouk Broche.
Le 9 octobre, nous pourrons assister à la sortie de résidence de la compagnie La Rocket avec La Force de Gravité (texte, mise en scène et jeu de Michelle Cajolet-Couture), l’histoire d’une famille québécoise qui bascule au cœur d’une odyssée morbide et céleste où le fantastique embrasse le quotidien. Le 13 au Théâtre Comoedia, place à Princess Miranda, un jeune public pour tous par la compagnie En avant scène de et avec Sabine Tamisier.
Enfin, le 16 octobre, le Théâtre Comoedia accueillera La Petite dans la Forêt profonde de la compagnie Des Femmes Savantes & l’Imprimerie, un texte de Philippe Minyana posant la question du mal et de l’inadmissible, tandis qu’à La Distillerie se jouera Sous Chambre d’Edward Bond par la Compagnie qui pousse (mise en scène de Clément Bougneux), une pièce d’anticipation sur l’évolution de nos sociétés occidentales au regard des immigrés.
À noter également deux représentations dans l’espace urbain, le 2 octobre à avec Les Arpenteurs par l’Association Rio/Home Théâtre, dans un lieu qui reste à confirmer et Dom Juan par le collectif À Vrai Dire le 7 octobre aux jardins Palissy.
L’après midi du 8 octobre sera consacrée à la rencontre des neuf compagnies sélectionnées avec le « Goûter des Créations » à 14h à la Distillerie, suivi d’un débat sur l’accompagnement à la création dans la coulisse du Théâtre Comoedia.
Olivier Puech
Place aux Compagnies : jusqu’au 17/10 à Aubagne.
Rens. : 04 42 70 48 38 – https://ladistillerieaubagne.fr/2021/08/09/du-10-sept-au-17-oct-2021-place-aux-compagnies/
Le programme complet de Place aux Compagnies ici