Les 10 ans de Klap, Maison pour la Danse
K d’école
Klap fête ses dix ans. L’occasion de revenir avec le chorégraphe Michel Kelemenis sur la nécessité d’un outil et d’un lieu dédié à la danse contemporaine, dans l’un des quartiers (Saint Mauron) les plus pauvres de France.
Pour les habitants du 3e arrondissement, les promesses non tenues en terme d’urbanisme n’engagent évidemment que celles et ceux qui les ont prononcées. Klap est donc, avec le Gyptis et la Friche La Belle de mai, un lieu essentiel dans le lien social qu’il procure, dans un partage artistique, éducatif et citoyen.
Ce qui pointe quand on franchit les portes de cette maison, c’est l’épure et la fonctionnalité du lieu. Ici, tout participe à la qualité des rencontres et du travail dans un espace apaisé. De la hauteur des plafonds à l’ouverture des espaces, de la qualité des studios à la simplicité des gradins, l’objet Klap est minutieusement pensé. Dès lors, comment la danse investit l’endroit ? Michel Kelemenis a souhaité inscrire Klap dans le réseau des maisons européenne de la danse, afin d’élargir le réseau des financements et des implications. Avec les manifestations Questions de danse et + de genre, il a mis l’accent sur la jeune création sans préférence nationale, mais avec un souci de montrer des projets en cours de développement.
La danse, contrairement au cinéma, ne possède pas de finitude, le danseur traverse la scène dans un élan et une respiration qui peuvent se suffire à eux même. Tout est provisoire et incertain, et rien ne sera identique le lendemain. Dans cette foison de propositions, une jeune génération (Marina Gomes, Arthur Perole) a trouvé avec Klap un lieu d’expression. On remarque une transversalité des projets et des collectifs, des danseurs rencontrent des musiciens et des scénographes pour porter d’une seule voix un objet chorégraphique. Un retour à l’écriture, avec la question du pas dans le récit, s’inscrit à l’opposé d’une danse participative appelant tout un chacun à rejoindre la scène (The Show must go on / Jérôme Bell).
Klap, c’est aussi une scène pour des auteurs reconnus (Thomas Lebrun, Olivier Dubois, Germaine Acogny, Louise Lecavalier). À la manière d’un campus, le génial côtoie l’éphémère et la danse contemporaine (bien servie, il faut le reconnaître) ne se contente plus de quelques dates sur les scènes nationales (le Merlan, la Criée, le BNM).
Avec le confinement, Michel Kelemenis a créé la manifestation 8m3, en réponse au protocole de distanciation sociale de 4m2 dans les espaces fermés. Là encore, il s’agit de ne pas reculer et de prendre ce qu’il est possible d’attraper par la force de l’esprit. En un an et demi, 8m3 revendiquent 250 solos de dix minutes à travers la France.
La danse contemporaine n’a de limite que celle de l’apesanteur, elle possède une capacité de résilience unique et universelle, parce qu’elle ne connait pas l’obstacle de la langue. Elle nous invite à la curiosité, à la simplicité des expressions, à la diversité des points de vue. Mais contrairement au street art, l’espace urbain ne lui suffit pas, parce que dans l’intimité d’une lumière tamisée, des choses intimes prennent forme, des esthétiques se révèlent et la relation à l’autre construit un espace du rêve.
Karim Grandi-Baupain
Festival Question de Danse : du 1er au 28/10 à Klap, Maison pour la Danse (5 avenue Rostand, 3e).
Rens. : 04 96 11 11 20 / www.kelemenis.fr
Le programme complet du festival Question de Danse ici