Regards sur le cinéma israélien
Bobines sociales
Pour la douzième saison consécutive, l’équipe des Regards sur le cinéma israélien nous propose de découvrir la richesse d’une production chaque année plus passionnante, qui n’hésite pas à prendre à bras le corps les sujets les plus dérangeants de la société.
Interrogé par Xavier Nataf, directeur de la manifestation, le cinéaste Raphaël Nadjari, réalisateur d’une sublime Histoire du cinéma israélien, soulignait : « La fiction israélienne essaie de se préoccuper de ce qui est juste, c’est sa grandeur et c’est son piège. » Il est en effet surprenant d’observer la qualité des productions récentes (Ajami, Lebanon — Lion d’Or à Venise —, Tu n’aimeras point…), qui parviennent à toucher un large public international tout en se distinguant en festivals. Un cinéma particulièrement attaché aux mécanismes sociaux et humains qui troublent depuis trop longtemps cette région du Proche-Orient. Quel que soit le genre abordé, du polar à la comédie, l’essentiel de la production israélienne offre, quasi systématiquement, un regard ciselé, pertinent, audacieux, et finalement à contre-courant du discours étatique, sur une réalité sociale complexe, subie par la population. Cette douzième édition vient donc confirmer la bonne santé d’une production pourtant très réduite (guère plus d’une vingtaine de films par an), mais fort soutenue par les pouvoirs publics, autant dans le champ de la fiction que du documentaire. Au programme, une dizaine d’œuvres inédites, dont, pour la soirée d’ouverture, le Prix du Scénario à Cannes en mai dernier : Footnote, dernier opus de Joseph Cedar, auteur en 2007 du remarquable Beaufort. Le film oscille entre farce et tragédie, nous plongeant dans un microcosme universitaire où se marient frustration, jalousie et soif de reconnaissance, sur fond d’études talmudiques et de conflit père/fils. Citons également The matchmaker, dernière œuvre d’Avi Nesher, auteur entre autres d’Au bout du Monde à gauche, qui nous renvoie dans l’Haïfa des années 60, auprès d’un curieux agent matrimonial, survivant de l’Holocauste, et de son jeune assistant découvrant le bouleversement amoureux. Xavier Nataf et son équipe accueilleront, parmi les invités de cette nouvelle édition, le cinéaste Eitan Zur, pour la projection de Naomi, dans lequel un éminent professeur découvre la double vie de son épouse, sublime jeune femme dont il reste éperdument épris. Au-delà d’une programmation passionnante, ces Regards sur le cinéma israélien mettent en lumière un projet initié par Yaêl Perlov, donnant la parole à de jeunes cinéastes palestiniens et israéliens, lors d’une projection de huit courts-métrages réalisés par ces étudiants du département Cinéma de l’Université de Tel-Aviv. Cette passerelle reste indéniablement à l’image de la production contemporaine israélienne : ouverte sur l’autre et désireuse d’en finir avec les crispations politiques interminables.
Texte : Emmanuel Vigne
Photo : Footnote de Joseph Cedar
Regards sur le cinéma israélien : du 15 au 21/06 aux cinémas César (4 place Castellane, 6e) et Variétés (37 rue Vincent Scotto, 1er). Rens. 08 92 68 05 97 / www.judaicine.fr