Moving Target par le Ballet National de Marseille
Dans le mille
Fruit de la première collaboration entre Frédéric Flamand et des architectes, Moving Target ne manque pas sa cible.
Le chorégraphe s’est librement inspiré des Carnets non censurés de Nijinski, célèbre schizophrène, figure mythique de la danse contemporaine, qui passa la moitié de sa vie en asile psychiatrique. La scénographie des New-Yorkais Elisabeth Diller et Ricardo Scofidio modèle la schizophrénie de Nijinski en dédoublant le regard du spectateur. Le dispositif, fait d’un miroir incliné à 45° au-dessus de la scène, d’écrans et projections vidéo, brouille nos repères visuels en mêlant réalité et illusion. Moving Target présente une chorégraphie libérée de la pesanteur. Les danseurs, à la technique irréprochable, évoluent dans une frénésie où se télescopent les délires verbaux de Nijinski transformés en slogans et des spots publicitaires vantant les mérites d’un produit miracle qui rend normal. Cette course effrénée, portée avec beaucoup d’enthousiasme par les danseurs du Ballet National de Marseille, multiplie les images surprenantes, les raccourcis imprévus, brouille les pistes. Moving Target propose une vision assez sombre d’une société déshumanisée, entrecoupée de flashs ironiques à l’humour féroce. Dans des décors sobres, de très beaux tableaux font oublier quelques scènes un peu longues.
Texte : Thomas Delahay
Photo : Barak
Moving Target par le Ballet National de Marseille était présenté du 9 au 12/05 au Théâtre de la Criée