Signes extérieurs de richesses
Voilà dix ans que le Théâtre du Petit Matin souffle de la poésie contemporaine aux oreilles des badauds et des autres, les lundis de juin, quand le soleil décline sur la grande bleue. Les Mots à l’Air, événement au charme incontesté, se déroule au bord de l’eau, à l’heure de l’apéro, pour entendre comédiens et poètes partager le plaisir des mots.
Tout a commencé rue Ferrari, dans un petit lieu qu’on ne présente plus, du moins quand on s’intéresse à la littérature contemporaine : le Théâtre du Petit Matin (TPM pour les intimes). Défendant depuis vingt-cinq ans, sous la direction de Nicole Yanni, des artistes qui ont le courage (et le talent) de mettre en formes les visages du monde et ses reflets de façon personnelle, il propose des rendez-vous intelligents. Des soirées littéraires novatrices et conviviales, en roue libre, sans aucune frontière. C’est donc tout naturellement qu’à partir du mois de juin, des textes parmi les plus poétiques trouvent leur place sur les récifs rocailleux de Marseille, à l’Anse de la Fausse Monnaie et sur la Plage des Légionnaires, des lieux propices à l’introspection, postés au bout du monde des hommes.
Cette année, trois poètes mettront des voiles à leurs mots. Philippe Jacottet partagera sa quête d’équilibre et de justesse : « La vérité semblait pourtant si simple, je n’en garde plus que la coque, vide, même pas : des masques, une singerie… », laisse-t-il entendre. Trois comédiens se chargeront également de restituer l’exigence de la mesure, avec « leurs corps en apesanteur tendus sur la roche. » La performance sera également au rendez-vous avec le Lyonnais Patrick Dubost, musicien de formation, qui se servira de la langue comme matière à rythmes, lui confiant ainsi un sens second des plus salvateurs. Enfin, en complicité avec le Théâtre des Bernardines, les textes de Florence Pazzottu, poète et vidéaste résidant à Marseille, seront lâchés en pâture aux profondeurs phocéennes. Comme le précise Nicole Yanni, il s’agira pour les acteurs/lecteurs de « mettre les corps à l’épreuve, faire sentir les éléments de la nature, se laisser inspirer par le vent, l’air, l’eau, le bruit des vagues, montrer au public que le rythme n’est pas loin, il est là, sur le rocher avec les gabians chantants. » Reste plus qu’à apporter des mignardises, une quiche, une bouteille de rosé, et se laisser bercer par l’abstraction du langage. A l’instant présent de faire le reste.
Texte : Diane Calis & Jordan Saïsset
Photo : Jordan Saïsset
Les Mots à l’Air : du 4 au 25/06 à l’Anse de la Fausse Monnaie et à la Plage des Légionnaires (7e). Rens. 06 16 91 58 37 / http://theatredupetitmatin.free.fr