Tendresse Molotov au Théâtre de Lenche
Victoria’s Secret
Avec sa dernière création, Tendresse Molotov, le Théâtre de Lenche nous sert un cocktail frappé jouant avec les préjugés et la xénophobie d’un couple bourgeois.
Ils sont riches, vaguement célèbres et racistes ordinaires. Ils s’apprêtent à faire un garçon (et uniquement un garçon), quand arrive un mystérieux colis qui va faire vaciller bien des certitudes. Maurice Vinçon, le fondateur du Théâtre de Lenche, met en scène cette pièce de l’auteur vénézuélien Gustavo Ott, qui joue des codes de la comédie pour traiter de sujets brûlants.
Quand le passé refait surface, Victoria, présentatrice du journal télévisé, a bien du mal à expliquer sa lointaine escapade new-yorkaise à son mari Daniel, avocat de renom dans un cabinet prestigieux. Les souvenirs oubliés, consciencieusement refoulés, réapparaissent ; le doute, la peur et la paranoïa s’installent, le mari voyant son mariage et sa carrière dangereusement compromis. Connaît-il réellement la femme avec laquelle il vit ? L’image du petit couple bourgeois évoluant dans sa bulle et aux préjugés propres à sa classe sociale se voit sévèrement et joyeusement brocardée.
Dans un décor moderne/kitsch assez épuré, l’énergique duo que campent Maryse Aubert et Roland Peyron se retrouve dans un tourbillon mêlant des militants du Hamas, la question islamiste, le terrorisme et une critique acide du conformisme.
Un dispositif vidéo accompagne les changements de scène et les confessions des personnages, participant à la réflexion sur le traitement de l’information par la télévision. Si elle n’évite pas quelques longueurs, cette agréable comédie de boulevard contemporaine au rythme enlevé réussit le pari d’aborder des sujets polémiques en décalant sans cesse le sérieux que le sujet pourrait induire.
Thomas Delahay