Il est coutume de dire que l’on a souvent du mal à voir le bonheur (même musical) quand celui-ci se tient juste sous nos yeux… Aveuglés que nous sommes par les spotlights de la hype parisienne, nous nous sommes un peu emballés, nous autres amateurs de hip hop de pointe, pour avoir vu en quelques producteurs de Paname… (lire la suite)
Il est coutume de dire que l’on a souvent du mal à voir le bonheur (même musical) quand celui-ci se tient juste sous nos yeux… Aveuglés que nous sommes par les spotlights de la hype parisienne, nous nous sommes un peu emballés, nous autres amateurs de hip hop de pointe, pour avoir vu en quelques producteurs de Paname (au hasard l’écurie Institubes) les uniques représentants français de la deuxième révolution hip-hop. Or il est grand temps de faire le tri au milieu de tout ce stock de paillettes. Et de dresser le portait de l’un des activistes français de ce « nouveau » hip hop qui n’a pas froid aux samplers et s’accoquine à l’electro, un producteur qui, sans aucun doute, fera toujours parler de lui quand les sirènes de la hype iront se prostituer ailleurs, un producteur qui en outre est… Marseillais. Il est coutume de dire que le bonheur est sous nos yeux, donc, mais qu’on a tendance à ne pas le voir. Et cela fait maintenant deux albums que le brillant 9th Cloud (traduction anglaise de l’expression « septième ciel ») se débat dans un milieu hip hop local un peu endormi sur les lauriers de sa gloire passée, ou pire, qui a tendance à pasticher les leaders de la capitale, alors d’autres villes attendent le retour de notre homme avec impatience après chacune de ses prestations ! La vérité serait-elle ailleurs ? Trop urbaine pour être estampillé electronica, trop fine et « en avance » pour n’être affiliée qu’à la scène rap, la musique de 9th Cloud affole les acharnés de l’étiquette, et reste de toute façon l’œuvre d’un gars trop authentique et simple pour être associé à la « nouvelle vague » (quel joli terme…) de producteurs parisiens précités, ceux qui passent plus de temps sur la piste du Paris Paris qu’à enregistrer leurs disques… 9th Cloud, lui, a donc choisi d’avancer seul (le parallèle avec Fred Flower est à ce sujet évident) et surtout de se consacrer à ce qu’il sait faire de mieux, sa musique, en sortant en novembre dernier un très bon deuxième album justement intitulé Delicate sounds. Pour décrire ce disque, imaginez que les mythiques Boards Of Canada, qui disent tirer une partie de leur inspiration de leur pratique acharnée du snowboard et de la beauté glacée des grandes étendues de neige, se soient plutôt mis au skate, ou encore que Para One produise ses tracks sous l’effet d’une substance hautement hallucinogène. C’est donc une sorte d’electronica de béton, un abstract hip hop aux rythmes ultra « breakés » mais aux boucles haut perchées qu’il développe sur ces treize titres, faisant le lien entre racines (un morceau en duo avec les géniaux beatboxers locaux de PHM) et sonorités électroniques actuelles. Tout ce que l’on aime… Quant au live, notre homme n’est pas en reste. Souhaitant dépoussiérer un peu le « show » hip-hop, il se produit dans une formule assez inédite, très inspirée des prestations d’artistes electro : ne pas rejouer stricto sensu les morceaux, mais produire un magma sonore intégrant mix, boucles déjà prêtes et improvisations. A voir ce jeudi chez Oogie, nouveau bastion du bon goût en matière de culture electro, mais aussi en tournée française (notamment au Midem cannois en janvier), épaulé par un autre « homme-machine » à surveiller de prêt : Humanleft. Ces dates seront l’occasion pour 9th Cloud de défendre son album, mais aussi de présenter une autre de ses facettes : il est en préparation d’une extension de son « live », intégrant une partie plus dancefloor qui, on vous le promet pour en avoir déjà éprouvé l’ébauche, va faire très mal… Avec ce disque et ses soirées injustement méconnues, ses connexions, notamment avec la surprenante Phocéenne Lu&nl pour des morceaux légèrement plus pop, 9th Cloud se place comme un des éléments centraux de la seconde génération de producteurs de musique urbaine sur Marseille. Celle qui comptera bien au-delà de notre ville dans le futur… JPDC
Le 14 en showcase à Oogie (55 cours Julien, 6e), 19h. Rens. 04 91 53 10 70
Dans les bacs : Delicate sounds (Montera Music/La Baleine)
www.9th-cloud.com