Un Casse-Noisette par la Cie Aca au Pavillon Noir
Coup de ballet sur Casse-Noisette
Loin des carcans académiques imposés par une certaine école de la rigueur, le chorégraphe Bouba Landrille Tchouda a présenté, au Pavillon Noir, Un Casse-Noisette métissé et acidulé.
Tout le monde connaît les mélodies entraînantes de Tchaïkovski et les thèmes emblématiques de Casse-Noisette : le passage de l’enfance à l’adolescence, l’amour, les forces du mal… Avec le temps et les versions, la fable onirique d’Hoffmann — notamment via le personnage central de Clara — a pris une tournure plus dense et riche.
Quand Bouba Landrille Tchouda voit l’adaptation de Maurice Béjart en 1998, il est immédiatement captivé par l’idée d’un voyage initiatique, aussi riche en matières obscures et inquiétantes qu’en potentiel merveilleux et enchanteur. Dix ans plus tard, il propose à douze danseurs de la compagnie Malka une adaptation très XXIe siècle de cet incontournable du répertoire classique.
Le mariage entre danse contemporaine, hip-hop et capoeira, parfaitement synchronisé sur la musique de Tchaïkovski, elle-même spécialement revisitée par Yves Talbot, illustre parfaitement les intentions du chorégraphe.
Clara rêve d’un monde qui n’existe pas, ivre de nouvelles aventures, se faisant prendre au piège du jeune Casse-Noisette qui, sous ses airs de prince charmant, se joue de la jeune éperdue pour l’enfoncer dans un cauchemar digne des Temps modernes. Il s’agit aussi pour le chorégraphe d’évoquer la traite des enfants ouvriers, un thème pourtant peu évident à introduire dans un conte aussi fantaisiste. Un sujet traité subtilement, à l’instar des autres grandes thématiques du conte : le bien et le mal, le réel face au rêve, l’enfant face à l’adulte…
Faisant écho à la version originale, qui proposait déjà une panoplie très diversifiée des danses du XIXe, la chorégraphie, admirablement servie par les interprètes, croise les techniques, allant même jusqu’à renvoyer à certains pas académiques du ballet originel.
Un Casse-Noisette à la hauteur du défi, qui confirme une fois de plus que la passerelle entre hier et aujourd’hui, entre le protocolaire et le révolutionnaire, ne demande qu’un pas de bourrée pour être franchie.
Sylvia Ceccato
Un Casse-Noisette par la Cie Aca était présenté du 19 au 22/03 au Pavillon Noir (Aix-en-Provence)