Une jeunesse chinoise – (Chine/France – 2h20) de Lou Ye avec Hao Lei, Guo Xiaodong
Décidément, la vie est belle (voir la chronique de Anna M. la semaine dernière) : Yu Hong est acceptée à la fac de Pékin où elle tombe amoureuse du mec le plus en vue. Pour se prouver qu’elle existe…
Le plus bel âge
Décidément, la vie est belle (voir la chronique de Anna M. la semaine dernière) : Yu Hong est acceptée à la fac de Pékin où elle tombe amoureuse du mec le plus en vue. Pour se prouver qu’elle existe, elle le trompe et en profite pour aller faire la révolution — normal, elle est juste à côté. Contrairement à ce que peuvent laisser craindre la bande-annonce et la presse, le film de Lou Ye n’a rien d’un teen movie d’émancipation sexuelle sur un air de barricade. Il se trouve que les émeutes ont lieu pendant leurs études. Il se trouve qu’ils baisent. Et que c’est le seul moment où la vie de Yu Hong a un sens. Commentés adroitement par son journal, les souvenirs d’Une jeunesse… découvrent en temps réel comment ça marche (pas) la vie. Cette saga — plus de dix ans — nous embarque lentement par sa justesse et les variations de son intensité. Tout y est palpable. La Chine tout d’abord, dans son évolution et ses disparités, où le réalisateur a préféré jouer la carte de la caméra spontanée plutôt que celle de la reconstitution froide. Le temps ensuite, avec ses longs regards en arrière qui donnent l’impression triste qu’il y a dix ans, c’était hier, en bizarre. L’hystérie se tarit avec les années, l’attente du lendemain devient désabusée et même si les fuites en avant se reproduisent, personne n’est dupe : on est après. Ne reste que la pression de l’impression que l’on est passé à côté. Et puis, surtout, cette idée indélébile que peut-être, même dix ans après, tout pourrait changer si l’on croisait ce mec que l’on n’a jamais aimé.
Emmanuel Germond