Camille Fallet, invité d’honneur du festival, présente un travail inédit sur Glasgow. Ce qui fut la seconde ville de l’empire britannique, splendide, riche et puissante n’est plus aujourd’hui qu’une ruine restaurée à la sauvette. Cette exposition s’attache à ce que chaque lieu et objet transcrit le soit comme l’indice le plus exemplaire et le plus éclatant de son esprit.
« Si vous regardez Glasgow en vue aérienne, elle vous semblera bombardée. Ce qui fut la seconde ville de l’empire britannique, son grand port du métal, de la construction navale et de l’ingénierie ferroviaire, n’est aujourd’hui qu’une ruine restaurée à la sauvette. Sa forme est, pour l’essentiel, la trace de la révolution industrielle et de l’âge d’or victorien. L’architecture de cette période recouvre à peu près la stylisation et l’appropriation de tous les courants architecturaux des grandes civilisations. Elle orne son commerce, son administration, ses cultes et son habitat. L’uniformité des grès rouges et ocres renforce son effet de décor. Glasgow fut splendide, riche et puissante. Mais depuis un siècle elle s’effondre. Perdant presque la moitié de son million d’habitants, elle est dorénavant célèbre pour les 54 ans d’espérance de vie dans les quartiers les plus pauvres de l’East End. Après une première tentative par le béton et l’automobile de redessiner sa géographie à la fin des années 70, la ville n’a survécu que par l’ablation de quartiers entiers. Les « merchant buildings », les « tenements », tout comme les grandes barres brutalistes ont disparu pour un monde du lotissement périphérique en crépi gris, créé grâce aux révoltes fiscales qui firent voler en éclat le grand Glasgow du Labour. Aujourd’hui la ville se porte un peu mieux. Elle reste une place financière importante et la promotion immobilière rafle les nombreuses friches pour trois fois rien. Les mêmes forces du capitalisme que l’on retrouve en action ailleurs dans les villes occidentales dessinent la Glasgow que nous pouvons voir. Mais plus qu’ailleurs Glasgow est la forme même du capitalisme, dans ce qu’il a de plus impersonnel et de plus violent. Si la période du milieu du XIXe au milieu du XXe siècle la voyait s’accompagner de la modernité en art et fut concomitante du développement de la photographie, j’ai bien peur qu’aujourd’hui son développement ne s’accompagne finalement que de sa muséification comme unique horizon. Je photographie Glasgow à la chambre photographique grand format en m’attachant à ce que chaque lieu, chaque objet que je transcris le soit comme l’indice le plus exemplaire et le plus éclatant de son esprit. J’ai choisi ici de montrer la ville sous l’apparence de tableaux en forme de raccourcis extrêmes de la ville. »
— Camille Fallet
Une exposition co-organisée par le festival Photo Marseille et le Centre Photographique Marseille, réalisée avec le concours de la Région SUD Provence Alpes Côte d’Azur et avec le soutien à la photographie documentaire du Centre national des arts plastiques.
Cette exposition fait partie de la programmation satellite des Rencontres d’Arles dans le cadre du Grand Arles Express
Damien Bœuf