Cycle « Nous (et) les animaux » à l’Institut de l’Image
Bêtes de scènes
En mars, l’Institut de l’Image d’Aix-en-Provence nous offre un cycle passionnant, « Nous (et) les animaux », explorant en une quinzaine de films, et une nuit entière de projections, la place du règne animal dans le récit cinématographique, en présence du critique Camille Brunel.
Nous le rappelons régulièrement dans ces colonnes, les origines du cinéma sont intimement liées à la science, devenue hégémonique dans la seconde moitié du 19
e siècle. Chercheurs majeurs dans l’émergence du cinématographe, Étienne-Jules Marey, Eadweard Muybridge et même Émile Reynaud mirent en lumière les premières techniques de reproduction du mouvement, filmant ou animant parfois le monde animal, comme en témoigne
Animal Locomotion de 1887. Dès lors, les animaux seront omniprésents sur la pellicule : véritables personnages de récits, tantôt alliés tantôt ennemis de l’espèce humaine, leurs apparitions imaginaires, sur l’écran, coïncident paradoxalement avec leur disparition du réel, dans une nouvelle ère industrielle. Comme le rappelait le critique Camille Brunel, «
le cinéma n’a pas beaucoup filmé de vrais animaux, et ce depuis ses origines. Le cinéma est né quand les animaux étaient morts. Fatalement, le cinéma de la nature, Jean Painlevé compris, est d’abord un cinéma de l’animal faux, enfermé, prisonnier, encagé, parce qu’au moment des premières caméras, toutes les forêts sont vides. » L’éminent auteur de l’essai
Le Cinéma des animaux sera ainsi l’un des invités du nouveau et passionnant cycle que l’Institut de l’Image d’Aix-en-Provence consacre en mars au règne animal au cinéma.
Camille Brunel accompagnera en effet, le samedi 5 mars, la séance de l’incontournable film de Frédéric Rossif, de 1975, produit par Sergio Leone,
La Fête sauvage. Comme le soulignait fort justement le cinéaste : «
C’est un film qui commence là où le documentaire finit. Les animaux sont des acteurs privilégiés. Avant que l’homme n’apparaisse, ils ont peuplé nos rêves : les animaux sont notre mémoire noire. Ils nous rappellent le temps ancien où nous bougions encore comme eux. »
Au programme de ce sémillant cycle, nous retrouvons bien évidemment quelques classiques à (re)découvrir sans réserves sur grand écran, du mythique
King Kong de Merian Caldwell Cooper et Ernest Beaumont Schoedsack, à
La Chasse au lion à l’arc que Jean Rouch filma à la frontière du Mali et du Niger, en passant par
Les Oiseaux, qu’un troublant fait divers survenu dans la ville de Santa Cruz parvint Alfred Hitchcock de réaliser, d’après la nouvelle de Daphné du Maurier, le fascinant
Phase IV de Saul Bass, sans oublier l’inoxydable
Les Dents de la mer de Steven Spielberg. Comme à l’accoutumée, de belles perles cinématographiques élèvent plus encore ces cycles de haut vol : c’est le cas ici du terrifiant
White God de Kornél Mundruczó,
Le Cheval de Turin de Béla Tarr ou
Long week-end de Colin Eggleston.
Enfin, l’équipe de l’institut de l’Image nous propose une plongée animale, vertigineuse et nocturne, avec, le samedi 26 mars, une nuit entière de projections, suivie du café et des croissants, avec au menu, entre autres,
Le Loup-garou de Londres de John Landis,
Razorback de Russel Mulcahy ou l’incroyable documentaire
Roar, de Noel Marshall, que l’on retrouve avec sa compagne — et actrice des
Oiseaux — Tippi Hedren et sa belle-fille Mélanie Griffith, vivant bien dangereusement au milieu de lions en liberté !
Emmanuel Vigne
Cycle « Nous (et) les animaux » : du 4 au 29/03 à l’Institut de l’Image – Cinéma de la Manufacture (Cité du Livre, Aix-en-Provence).