Temps fort dédié aux artistes du champ des arts visuels des territoires ultramarins : rencontres, expositions, concerts, performances...
En 2009, la Grande Halle de la Villette présentait dans l’exposition Kreyol Factory les œuvres de quelques 60 artistes contemporain·es qui questionnaient, du point de vue de l’imaginaire collectif et des identités, ce qui est commun et spécifique aux espaces de la créolité, avec une large place donnée aux artistes ultramarin·es.
Depuis, très peu d’événements d’envergure sont venus donner de la visibilité dans l’hexagone aux nouvelles générations d’artistes ultramarin·es. Si dans le domaine du spectacle vivant, des festivals importants comme les Zébrures d’automne à Limoges (sous la direction d’Hassane Kouyaté) ou le TOMA à la Chapelle du Verbe Incarné en Avignon (dirigé par Greg Germain) ou encore le Mois Kreyol en Ile-de-France (sous la direction de Chantal Loial) viennent ponctuer la saison culturelle en France, dans le domaine des arts visuels, aucun événement important n’existe pour renforcer la présence en France hexagonale de ces scènes en plein essor. Quelques figures, telles Julien Creuzet, Gaëlle Choisne ou Kenny Dunkan, ont certes émergé ces dernières années, mais pour la plupart, la traversée est difficile, les mobilités complexes et l’insertion dans le champ professionnel français freiné par de multiples obstacles (formation, réseaux, structuration des filières dans les territoires ultramarins, etc.). Aussi, bon nombre d’artistes ultramarin·es ont réussi à émerger en se rapprochant (et en s’y reconnaissant à bien des endroits) des grands rendez-vous de la création contemporaine du sud global, notamment du continent africain (Biennale de Dakar, Rencontres photographiques de Bamako, etc.) où la dimension afrodiasporique a, au fil des années, constitué une communauté professionnelle transnationale et solidaire.
Aujourd’hui, plusieurs initiatives travaillent à accompagner le rayonnement des scènes franco- phones et ultramarines ou plus largement des régions européennes ultrapériphériques, telles que le programme de résidence ONDES de la Cité Internationale des Arts ou le programme européen (DG Regio) Archipel.eu de l’Institut français.
Parallèlement, sur les territoires, la filière se structure : FRAC, école d’art, Documents d’Artistes à la Réunion, centres d’art indépendants, galeries, etc. Une nouvelle génération d’artistes a ainsi émergé et grandi, en s’affranchissant souvent de la relation bilatérale avec l’hexagone, travaillant largement dans leur aire culturelle et géographique : les caraïbes (et par extension le continent américain) et l’océan Indien (et par extension le continent africain).
Avec le Pacte pour la visibilité des Outre-mer signé par le Ministère de la Culture et celui des Outre-mer, ce « Champ d’Îles », qui fait bien sûr référence au poème d’Edouard Glissant, pourrait s’inscrire durablement dans le calendrier de la saison culturelle de l’hexagone, avec une première édition portée par la Friche la Belle de Mai en partenariat avec le FRAC Réunion, Fraeme, le centre d’art contemporain Triangle-Astérides : deux expositions collectives, un programme de performances et de résidences ainsi que des rencontres professionnelles coordonnées par le réseau Documents d’artistes devraient poser les bases d’un rendez-vous récurrent, dont nous faisons le pari que la nécessité disparaitra avec le temps.
— Alban Corbier-Labasse, Directeur Général de la Friche la Belle de Mai
Article paru le mercredi 17 janvier 2024 dans Ventilo n° 493
Week-end d’ouverture du temps fort « Un champ d’îles »
Avec un seul centre d’art (Carma, en Guyane), un FRAC (à La Réunion), deux écoles reconnues par l’État (en Martinique et à La Réunion) et pas de musée d’art contemporain, les départements et régions d’outre-mer, qui comptent en tout près de trois millions d’habitants, manquent cruellement de structures dédiées aux artistes. Ils constituent pourtant un vivier bouillonnant de créateurs en tout genre, ce que ce temps fort — nommé en hommage au grand écrivain antillais Édouard Glissant — se propose de mettre en lumière. Au programme du week-end : l’inauguration de deux expositions collectives rassemblant près d’une soixantaine d’artistes des territoires ultramarins français et d’Haïti ; une rencontre, joliment et justement intitulée « Loin ne veut pas dire petit » sur les multiples réalités et enjeux des arts visuels au sein de ces territoires éloignés les uns des autres comme de l’hexagone ; et une soirée de performances, projections vidéo, concerts et Dj sets pour célébrer de manière festive ce champ d’îles aux langages et imaginaires féconds.
CC
Du 2/02 au 2/06 à la Friche La Belle de Mai (3e)