Le ventre de leur terre

Ce cycle porté à quatre mains est le fruit d’une conversation qui a mûri et éclos dans le temps. À l’origine, l’expérience des saisons agricoles, des lectures parcourues, des images et des films partagés. Et, peut-être, un peu de nostalgie aussi – cet état de regret mélancolique d’un monde qu’on n’a pas vécu. De la curiosité pour un mode de vie davantage qu’un métier, qui reste aujourd’hui encore rythmé par les saisons. Une sorte de fascination pour ces femmes et ces hommes pris dans les rouages d’une activité qui ne tolère pas le repos. Certains des films qui sont proposés font mémoire. Ils portent en eux la trace d’un monde qui n’en finit pas de disparaître et qui pourtant perdure et mute. Le geste cinématographique, dont celui de Vittorio De Seta est peut être le plus manifeste, s’est longtemps attaché à enregistrer et restituer ce « monde perdu », comme l’expression d’une urgence à filmer ce qui a été, ce que l’on croit qui est, ce que l’on veut qui soit.

Il s’agit ici de sonder les liens de proximité entre l’homme et la nature, de l’homme et du paysage, de la terre qui nourrit l’homme et des animaux auxquels son existence est intimement liée. Espaces à la temporalité singulière, qui révèlent des territoires et des gestes sans cesse répétés, qui engagent les corps. Et c’est par ces gestes au travail, au labeur, au labour, que la relation se crée.

Mais ces espaces ne sauraient être envisagés sans donner à voir leurs ambiguïtés. Intrinsèquement liés aux questions de mode de production et d’exploitation, ils renferment des réalités contrastées.

Cette programmation chemine d’enchantement en désenchantement, traversée par des tensions multiples. Loin d’une vision fantasmée ou idéalisée, elle se veut rendre compte du large spectre des pratiques et des échelles de production, de la plus humble à la plus déraisonnée. Le soleil, la sueur, la boue et le sang sont autant de motifs qui habitent ces quatre séances.