Nos deux rives
Les traversées
Aflam investit plusieurs lieux marseillais pour une nouvelle programmation, Nos deux rives, où la question centrale du mouvement et des déplacements résonne avec l’essence même du cinéma.
Si le cinéma est l’art du temps, il est également celui du mouvement. Ou plus exactement de l’interactions des mouvements. Celui de la caméra — donc du regard —, des personnages dans et hors du champ, des lignes de fuite et de la perspective, voire des fonctions sensorielles du spectateur, idée chère à Gilles Deleuze. Le mouvement n’est pas la ligne droite d’un point à un autre, mais bel et bien l’infini champ des possibles qu’offre le cinéma. Ce mouvement est une thématique explorable sans fin, où la sémiotique le dispute à la philosophie, voire à la sociologie des personnages filmés. C’est dans cette perspective que l’excellente structure marseillaise Aflam nous propose la manifestation
Nos deux rives. Les six films programmés, ainsi que la performance visuelle et sonore
Diaphragme de Mayssoun Kleiche et Samyr Mohellebi, nourriront ici l’idée que le déplacement est moins affaire de territoires que d’espaces cinématographiques, ouverts par les prolongements des regards, représentation idéale des questions humaines qui soulèvent notre actualité. Au Théâtre de l’Œuvre, à la Baleine, au
Pas Sage et à la Friche la Belle de Mai, la programmation est toujours à l’image du formidable travail développé depuis de nombreuses années par l’équipe d’Aflam, devenue incontournable dans la diffusion des cinématographies des pays arabes et du Moyen-Orient. Au programme notamment,
The Last of Us du Tunisien Ala Eddine Slim à la Baleine — en présence du réalisateur — ou
En attendant les hirondelles de Karim Moussaoui (à la Friche), qui avait fait en salle, voilà deux ans maintenant, une sortie particulièrement remarquée, après son passage à Cannes. Si l’on rajoute à cette initiative la performance suscitée, et la belle séance de courts au Pas Sage, l’équipe d’Aflam prouve une fois encore que l’exploration cinématographique dont elle s’est faite l’essence offre à la cité phocéenne ses plus beaux moments de cinéma.
Emmanuel Vigne
Nos deux rives : jusqu’au 23/06 à Marseille.