Série Still Life d'Atak

Atak – Still Life, A Collector’s World au Studio Fotokino

De bonnes compositions

 

 

Le Studio Fotokino expose le travail de Georg Barber, plus connu sous le nom de Atak, jusqu’au 21 mars. Vu les circonstances, l’exposition a ouvert au public sans vernissage ni temps de rencontre avec l’artiste. On espère sincèrement que cette rencontre pourra avoir lieu à un autre moment. En attendant… carpe diem : l’exposition Still Life est très belle !

 

 

Georg Barber est né et a grandi à Berlin Est ; il avait vingt ans lorsque le mur qui séparait sa ville en deux est tombé. Dans l’intervalle, ses premiers pas dans l’art et la culture sont placés sous le signe de l’interdiction. En effet, côté RDA, rares sont les morceaux de culture populaire qui filtrent de l’Ouest. Une simple BD de Lucky Luke est un véritable trésor, rare et précieux, qui passe secrètement de main en main. La musique noise punk industrielle, à laquelle Georg s’adonnera pour quelques concerts clandestins, est quant à elle prohibée. Tout comme le graffiti, qu’il pratiquera pourtant, en conservant son nom de scène punk : Atak. Un passé qui explique ce pseudonyme, mais peut-être aussi la collection.

Peintes entre 2019 et 2020, les œuvres de l’exposition Still Life, A Collector’s World été réalisées sur-mesure pour Fotokino. La plupart d’entre elles sont donc exposées pour la première fois. Entre autres, la série de dix toiles éponymes de l’exposition — Still Life — qui met en scène et en peinture des objets de la collection personnelle de l’artiste. Figurines, images, albums, œuvres d’arts et objets du quotidien sont représentés, juxtaposés et superposés dans des compositions très denses, aux couleurs vives, dans un style pseudo-naïf — car finalement très maîtrisées et truffées de références. On retrouvera ainsi avec plaisir de nombreux personnages de dessins animés ou de BD, des références à l’histoire de l’art, des clins d’œil à des amis artistes ou à des lieux amis, parmi lesquels Jockum Nordström ou Fotokino.

D’hommages en clins d’œil, de citations en emprunts, ces natures mortes sont peuplées d’artistes, d’œuvres et de personnages de la culture pop qui fonctionnent ici comme autant de samples — des morceaux d’œuvres qui viennent ensemble composer une autre œuvre, « à la manière de la musique hip-hop ». Ce procédé nous fait voyager sur place, chaque tableau formant à lui seul un cabinet de curiosités. De nouvelles relations s’y nouent, entre objets culturels et/ou naturels (fleurs, insectes, papillons, oiseaux), de nouvelles histoires s’écrivent. On prend plaisir à se perdre dans ces natures mortes, à en faire l’inventaire, à reconnaître, peut-être, un jouet ou un comics de notre enfance.

Et, pour pousser plus loin la mise en abime, ce jeu de miroir entre représentation et représentation de la représentation, plusieurs de ces objets figurant dans les peintures sont aussi réellement présents dans la galerie : une figurine de Tintin, une autre de Cheburashka, une sculpture africaine, une estampe japonaise…

Naturellement, les livres de l’artiste n’échappent pas au jeu de la représentation, et on les retrouvera côté galerie comme côté librairie. Parmi ces livres, les visiteurs pourront découvrir en exclusivité le petit dernier, Piraten im Garten, une histoire de pirate qui se passe dans un jardin — cet autre haut-lieu du voyage immobile.

 

Frédéric Vaysse

 

Atak – Still Life, A Collector’s World : jusqu’au 21/03 au Studio Fotokino (33 allée Léon Gambetta, 1er).
Rens. : www.fotokino.org