Au voleur – (France – 1h40) de Sarah Leonor avec Guillaume Depardieu, Florence Loiret-Caille, Jacques Nolot…
L’échappée belle
Simple coïncidence ou mouvement de fond d’un certain auteurisme français, Au voleur fait résonner étrangement les turbulences libertaires du dernier film d’Alain Guiraudie, Le roi de l’évasion, sorti il y a tout juste deux mois. Manifestations salutaires et créatrices face au tout sécuritaire, ces deux films s’aventurent dans des chemins de traverse que le cinéma hexagonal semble avoir abandonnés depuis longtemps. Comme chez Guiraudie, Sarah Leonor inscrit son film dans un territoire bien défini, présente ses personnages, un début d’intrigue puis, comme par magie, fait exploser son récit en le transformant en un road-movie (quoique fleuve-movie conviendrait mieux ici) aux accents utopiques et oniriques. Si l’amourette qui occupe le début du film entre une jeune professeur d’allemand et un Arsène Lupin de province peine parfois à retenir pleinement notre attention, on se délecte volontiers par la suite de la liberté retrouvée par ces amants en fuite, et aussi d’un cinéma qui donne ici la pleine mesure de ses potentialités. La caméra flotte au-dessus de la rivière qui emporte ce couple improbable, saisissant au passage toutes les nuances de vert d’une nature à la beauté doucereuse. On retiendra aussi ces belles images de la silhouette de Florence Loiret-Caille, qui semble danser devant le feu immense d’une fête champêtre. Si le film rêve et nous fait rêver, il n’en oublie pas pour autant une certaine crudité qui clôt le récit et le ramène par là même à une réalité froide et désenchantée. Au petit jeu des gendarmes et des voleurs, on sait qui gagne, mais l’important est ailleurs.
nas/im