Plus Babel la vie

Après un début d’année mortifère, tandis que la culture est prise pour cible, et entre deux tours d’une élection départementale qui voit les nationalistes se nourrir grassement de ce climat délétère, la onzième édition de Babel Med tombe franchement bien.

La onzième édition du salon des « musiques du monde » (concept certes vieillissant mais pratique dans le cas présent) vient rappeler à tous que chaque pas en faveur de la découverte de sa propre culture et de celle de l’autre est un pas vers la paix. A l’heure où le mépris et l’ignorance nous reviennent en pleine gueule, tel un retour de manivelle auquel on ne s’attendait plus, le festival semble plus important que jamais.
Il sera une fois de plus l’occasion pour des artistes des cinq continents de partager un instant privilégié avec un large public, devant un parterre de professionnels la journée, lors du salon, puis le soir devant le public. D’autant que le festival semble encore un peu plus faire référence à l’étranger (des journalistes débarquent de partout et descendent de toute l’Europe du Nord), devenant un interlocuteur majeur en matière de cultures du bassin méditerranéen, trop souvent réduites en une seule et même entité chifonnée sur une carte postale, forcément plus facile à marketer que la myriade de particularismes qui jouxtent cette mer complexe mais réduite, pour la belle saison, à l’exotisme mercantile.
Les événements de cette année donnent une valeur symbolique toute particulière à Babel Med : en faisant la promotion d’esthétiques musicales à forte teneur en histoires, qui participent de la connaissance des peuples, il demeure un concentré de toutes les valeurs visées par les obscurantistes qui censurent, ici ou ailleurs, les différences et les langues, assassinent des artistes, brisent autant de savoirs que de statues. Alors, que vous soyez plutôt rock ou techno, Mozart ou pizza aux anchois, cacher ou hallal, prenez la main de votre voisin que la peur a rendue bleu marine et emmenez-le ce week-end au Dock des Suds, à la découverte de sa propre culture (l’universel commence au pas de la porte) et de celles des autres, pour les faire dialoguer l’une et l’autre. Non pas pour l’enivrer et qu’il oublie l’adresse de son bureau de vote, mais bien parce que ce festival est un antidote au repli identitaire. Le reflet d’un monde multicolore qui, certains ont tendance à l’oublier, n’est pas fait que de gens mal intentionnés. On vous laisse maître de partir à la découverte d’une programmation d’autant plus pertinente qu’elle n’oublie personne, servant aussi bien de port d’attache que d’aller simple. Car cet élan de vie n’est toujours pas vain, mais bel et bien en marche.

Laurent Jaïs & Jordan Saïsset

Babel Med Music : du 26 au 28/03 au Dock des Suds (12 rue Urbain V, 2^e).
Rens. : dock-des-suds.org/babelmedmusic2015

La programmation complète de Babel Med Music ici