Benito Pellegrin – Marseille quart Nord (Editions Sulliver)
A l’instar des couteaux, les romans peuvent avoir de multiples usages, et à défaut d’être suisse, ce livre nous en donne ici une éclatante démonstration. Le regard d’un jeune émigré espagnol — orphelin d’un père anarchiste dont les ossements enrichirent le macabre mausolée du Caudillo — sur ce Marseille d’après-guerre, son oreille aussi, avec cette langue, véritable faconde marseillaise subtilement retranscrite (loin des accents Ducros), font d’abord de ce roman une succulente fresque familiale et sociale. L’immersion, en compagnie d’une foisonnante galerie de personnages, dans le quotidien de ce prolétariat d’après-guerre nous en apprend ensuite beaucoup sur cette ville, sa mentalité (racisme, intégration), son urbanisme, son histoire… et nous suggère même quelques pistes d’originales balades citadines. Du style, de la poésie, de l’humour et en prime, un ou deux éclats de rire : à lire d’urgence.
LC