Coffret Lionel Rogosin
Avec On the bowery, Come back, Africa et Good Times, Wonderful Times (Carlotta)
Si l’on garde essentiellement des années 50 aux Etats-Unis la vision d’une dernière décennie d’âge d’or hollywoodien dominée par les grands studios, une poignée de réalisateurs partisans d’un cinéma libre et indépendant, donc fauché, commencent à retrouver une reconnaissance posthume. C’est le cas de Lionel Rogosin, grand admirateur de Flaherty et du néo-réalisme italien, qui revendiqua une liberté totale de filmer, en opposition avec le carcan hollywoodien. Le cinéaste offrit ainsi une vision sauvage et humaniste des Etats-Unis, n’hésitant pas à sortir sa caméra dans la rue, à la rencontre de tous les oubliés de la société.
Coffret Alexander Kluge
Avec Dans le danger et la plus grande détresse…, Ferdinand le radical… (Choses vues)
Kluge est l’un des plus passionnants cinéastes allemands. Dorénavant passé à la littérature, cet ancien assistant de Fritz Lang laisse derrière lui de nombreux documentaires et longs-métrages dans lesquels la ville tient un rôle prépondérant. Une ville toujours bruissante, souvent en conflit avec ses habitants, mais au-delà, un personnage politique à part entière. Même dans ses œuvres futuristes, elle accompagne la lutte des hommes, celle des classes, des renversements politiques, des grèves générales, des combats sociaux, des actes terroristes désespérés, dans une vision contemporaine et crépusculaire de l’urbanisme.
Out of the blue
(USA/Canada – 1980) de Dennis Hopper (Bach Films)
Sorti en 1980, Out of the blue est un ovni cinématographique, un brûlot punk désenchanté. Ou comment la société américaine, rouleau compresseur impitoyable pour les plus faibles, a écrasé avec les années le rêve hippie et l’énergie punk. Le tout baigné par le lancinant morceau de Neil Young, Hey Hey My My. En suivant l’autodestruction d’une famille américaine, le réalisateur-acteur nous délivre un message d’un nihilisme absolu. Présenté à Cannes mais sorti dans l’indifférence totale, film offre ainsi une vision d’une société en pleine mutation, où apparaissent clairement les stigmates d’un individualisme désespérant.
Espigoule, la cinquième saison
(France – 2009) de Christian Philibert (Films d’Espigoule)
Philibert offre une surprise de taille aux fans du désormais cultissime Les quatre saisons d’Espigoule en éditant La cinquième saison. Soit trois heures de programme compilant ses premiers courts-métrages (les excellentes minutes d’Espigoule), les scènes inédites du film, le making of et les différentes réactions lors de la promo, avec une préférence pour la traversée de la Croisette par les Espigoulais lors du Festival de Cannes. Trois heures de bonheur qui nous plongent à nouveau au cœur de ce village sidérant, où « tout n’est pas vrai, mais rien n’est vraiment faux » !
Coffret Robert Kramer
Avec Milestones & Ice (Capricci)
Rendons grâce à Capricci, maison de production occasionnellement éditrice, qui nous offre la version DVD de l’œuvre immense qu’est Milestones. Kramer nous plonge au cœur d’une Amérique post-beatnik, pour un voyage sidérant de trois heures et quart où se mêlent avec instinct de nombreuses pistes narratives et cinématographiques. Profondément tellurique, le film suit le parcours de ces hippies en pleine descente de trip égalitaire, à la recherche de nouvelles voies d’émancipation, de communautarisme et d’expression. Les paysages, somptueux et nus, semblent répondre, comme un écho, aux échecs des aventures collectives.
4 films de et sur Sharuna Bartas
Dont Seven Invisible Men, Few of us, The House… (Les Films du Paradoxe)
S’imposant depuis quelques années comme l’un des éditeurs indépendants les plus dynamiques, Les Films du Paradoxe livrent avec ce coffret un panorama presque complet de l’univers envoûtant de Sharunas Bartas. Visionnaire, le cinéaste lituanien aime à s’interroger sur la place de ses personnages dans un univers parfois trop vaste pour eux. Il étire un regard silencieux et profond sur les paysages de vie, sur leurs mouvements, et sur les nôtres. Léos Carax, qu’il dirigea dans The House, dira de lui : « Découvrir les films de Sarunas, ici et aujourd’hui, c’est aussi redécouvrir cela : il n’y a pas de réalités lointaines. »
Le monde perdu
Dix courts documentaires (Italie – 1954/1959) de Vittorio De Seta (Carlotta)
Les dix principaux courts-métrages de Vittorio De Seta enfin en DVD ! Carlotta Films nous a offert l’une des plus belles surprises de la rentrée avec cette plongée magnifique au cœur de l’œuvre du réalisateur palermitain. Entre documentaire et cinéma anthropologique, De Seta témoigne d’un monde passé, celui d’une Italie du Sud pauvre et rurale. Il y filme paysans, mineurs, pêcheurs ou bergers avec une exigence et une sobriété folles, teintées d’un léger lyrisme. Le coffret est enrichi d’un entretien avec l’immense cinéaste, qui revient sur la conception de ses films et livre aussi sa vision d’un monde paysan, aujourd’hui.
Le monde sur le fil
(Allemagne de l’Ouest – 1973) de Rainer Werner Fassbinder (Carlotta)
Trésor peu connu de l’immense Fassbinder, Le monde sur le fil vient compléter la courte liste des chefs d’œuvre d’anticipation qui n’ont nul besoin d’une avalanche d’effets spéciaux pour prouver leur efficacité. Le film est construit sur un programme de réalité virtuelle, simulateur d’évènements sociaux, politiques et économiques. Le résultat est une intelligente fable métaphysique, où faux-semblants et jeux de miroirs emportent le spectateur dans les méandres d’un futur proche, assailli par l’angoisse et la paranoïa. A cela s’ajoute un travail graphique époustouflant, doublé d’une bande-son maîtrisée.
Il était une fois la RKO, l’âge d’or d’Hollywood
Coffret 25 film (Editions Montparnasse)
Les éditions Montparnasse réunissent enfin leur impressionnant travail de défrichage du catalogue de la RKO en un seul coffret. De quoi prendre conscience du rôle essentiel tenu par le fameux studio dans l’histoire du cinéma, qui accoucha de chefs d’œuvres (Citizen Kane, King Kong…), mais reste surtout dans les mémoires comme le plus grand promoteur de la série B, ces films aux budgets ridicules projetés en ouverture de l’opus principal. Une production bis au cœur de laquelle on trouve les œuvres les plus créatives, les plus subversives de la production américaine des années 50 (La féline, The Body Snatchers…).
La stratégie du choc
Documentaire (GB – 2008) de de Michael Winterbottom (Editions Montparnasse)
Le cinéaste anglais met toutes ses compétences au service de Naomi Klein, reprenant les théories développées dans son ouvrage éponyme, témoignages audiovisuels à l’appui. La militante canadienne analyse les concepts de Milton Friedman pour expliquer l’apparition, ces dernières décennies, de la stratégie du choc. Principale influence de la pensée libérale républicaine, l’économiste comprit que les grands chocs historiques (effondrement de l’ex-URSS, 11 septembre…) étaient autant d’occasions précieuses pour faire passer les plus intolérables réformes économiques, profitant ainsi d’un « état d’hébétude » des populations.