Brothers – (USA – 1h45) de Jim Sheridan avec Jake Gyllenhaal, Tobey Maguire…
Soldats de plomb
Avant son départ pour les USA, la force de Jim Sheridan résidait dans le choix original de ses scénarios (My Left Foot) et/ou dans la profondeur de ses sujets (The Boxer). Depuis, quelques notes plus superficielles sont venues s’immiscer dans les opus du réalisateur irlandais. Déjà 2004, In America, titre symbolique s’il en est, établissait une certaine règle de la linéarité, à laquelle Brothers n’échappe pas. Si le film ne s’avère certes pas totalement insipide, il peine réellement à étinceler. Pire, malgré une facture technique correcte dans son ensemble et des comédiens plutôt justes (y compris Natalie Portman), jamais il ne convainc. Le hic semble en grande partie dû au fait que Sheridan n’arrive pas à faire du neuf avec les vieilles ficelles intellectuelles qui nourrissent son histoire. La réflexion souffre d’une évidence trop grande. L’équation se révèle trop sommaire à résoudre, simplement parce que le thème a déjà été débattu un grand nombre de fois au cinéma. Comment un soldat peut-il réintégrer la vie civile après avoir enduré les horreurs de la guerre, en l’occurrence celles de l’Afghanistan ? : voilà la question éléphantesque avec laquelle Sheridan arrive naïvement. Il semble avoir oublié qu’il y a trente ans, les Etats-Unis sortaient du Vietnam et que nombre de cinéastes, de Milos Forman à Oliver Stone en passant par Stanley Kubrick, se sont penchés sur cette problématique. Pour ne pas échouer sur une voie de garage, il apparaissait dès lors plus que nécessaire d’embrayer et de passer à la vitesse supérieure. Certes disséminés, les clichés s’accumulent malgré tout, tandis que les dialogues peinent à relever le plat et que l’enchaînement des séquences s’alourdit de minute en minute. On l’aura compris, Brothers n’est pas une œuvre indispensable, s’inscrivant dans ce flot incessant de films quelconques oubliés aussitôt sorti de la salle…
Lionel Vicari