Ubu Roi
_Comédie par le Théâtre de la Massue d’après Alfred Jarry
Apparue dès sa création au Théâtre de l’Œuvre en 1896 comme une formidable matière scénique, la farce potache d’Alfred Jarry — recyclage grotesque des grands classiques, Macbeth en tête — est aujourd’hui l’une des pièces les plus jouées en France et de par le monde. Normal : un siècle plus tard, le texte fondateur du théâtre de l’absurde — parodie de royaume d’opérette et pamphlet contre la guerre — reste d’une étonnante actualité. Et si toutes les versions ne se valent pas (bien qu’on ait beaucoup apprécié l’adaptation survoltée de Massimo Schuster ou celle, plus récente, d’Eric Poirier au Lenche), celle qu’en donne Ezéquiel Garcia-Romeu, suite à une commande de l’Auditorium d’Orsay, est pour le moins succulente. Renouant avec l’atmosphère de la pièce originelle, faisant dialoguer acteurs de chair et de sang, marionnettes et figurines en argile sur fond d’ombres chinoises, l’étonnant metteur en scène et scénographe argentin crée un univers loufoque à la (dé)mesure du délire verbal de Jarry.
_Du 8 au 18/11 à La Criée
La compagnie des spectres ou les paralipomènes du maréchal « Putain »
_Création par le Théâtre du Maquis d’après Lydie Salvayre
Un huissier se présente chez une femme pour procéder à un inventaire avant expulsion. Rose, qui vit avec sa fille Louisiane, se croit toujours en 1943, année où son frère fut assassiné par la milice. Pour icelle, l’huissier est l’envoyé du Maréchal « Putain ». Plutôt que de canaliser la folie de sa mère, Louisiane va s’approprier son délirant discours, pour enfin construire sa propre histoire et se rendre apte à décider de sa vie — et mettre l’huissier/« l’envahisseur » hors ses murs. Histoire de la transmission d’une révolte aux marges de la folie, La compagnie des spectres est aussi le tour de force de Florence Hautier, seule en scène, qui s’accapare avec brio les trois rôles du roman de Lydie Salvayre. Ici, dans un jeu éprouvant/émouvant d’équilibriste, l’actrice n’est jamais tout à fait dans l’incarnation, ni dans la distance, elle est le texte. Une performance d’un genre nouveau que le metteur en scène Pierre Béziers, du Théâtre du Maquis, se plait à appeler « scriptodrame »…
_Du 9 au 25/11 au Théâtre Ainsi de Suite (Aix-en-Pce)
Jésus de Marseille
_Création par la Cie Pile Poil d’après Serge Valletti
Pizzaïolo de son état, Jésus accomplit des miracles à coups de pizzas aux moules et aux supions quand il n’est pas occupé à porter sa croix — comprenez : « ses parents, la rue des Trois-Mages, Satan, les marchands de tout, les médecins, les pharmaciens, les poissons, les crabes, les adversaires des camions pizza, le Stade vélodrome et même la Canebière et ses souvenirs. » Marseillais, Jésus a l’inextinguible verve de son créateur, Serge Valletti, qui narre ici plus que l’histoire d’un homme, celle de toute une cité, la plus vieille et la plus populaire de France. Et qui mieux que Christian Mazzuchini pouvait incarner le héros de cet Evangile selon Valletti ? Complices depuis plus de dix ans, les deux hommes (dont on avait notamment adoré le délirant Psychiatrie/ Déconniatrie il y a trois ans, déjà aux Salins) reviennent donc — sans caricature, mais avec en commun une sensibilité poétique tendre et canaille— sur cette ville qui les unit, la capitale du verbe, fière et démesurée : Marseille.
_Les 9 & 10 au Théâtre des Salins (Martigues)
Gourbi
_Création hip-hop par la Cie Pokemon Crew
Flash-back : nous sommes en 1997, lorsque quelques danseurs amateurs, via des « démos urbaines », passent rapidement de la rue aux Arcades de l’Opéra National de Lyon. Au fil des rencontres et autres échanges, un groupe de breakeurs se forme naturellement en 1999, avec, en point d’orgue, sa toute première « battle » à Grenoble. De victoires — champion de France — en consécration — champion du Monde —, le Pockemon Crew devient incontournable et respecté au point de devenir résident permanent à l’Opéra lyonnais. Dix ans après, la compagnie est devenue une véritable institution. Désormais, il existe une empreinte Pockemon Crew, belle et plurielle, puisque plusieurs danseurs du collectif sont à l’origine de nouvelles gestuelles break dance et devenus des références par-delà les frontières. Réunissant aujourd’hui une vingtaine de danseurs, la compagnie présente en ouverture du festival Zone danse hip-hop, Gourbi, leur dernière et explosive création, entre esthétisme et technicité, chorégraphiée par Yann Abidi et Riyad Fghan.
_Le 13 au Théâtre de la Colonne (Miramas) dans le cadre du festival Zone Danse Hip Hop
CC / HS