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Au FRAC, une programmation vidéo en trois volets nous fait voyager dans les nouvelles formes de la performance.
Au cours du XXe siècle, la performance a fait exploser les frontières de l’art et de l’œuvre. Pourtant, les mouvements qui sont allés le plus loin dans cette remise en cause — dada, Fluxus ou l’actionnisme viennois — sont désormais exposés dans les musées. Le geste éphémère de l’artiste en interaction immédiate avec son public, la fusion de l’art et de la vie ne sont donc plus aussi importants pour les artistes contemporains que pour leurs aînés. Les « installations performatives » actuelles n’opposent plus l’événement et sa représentation, mais développent une réflexion sur sa mise en scène, et sur les dispositifs d’enregistrement mêmes. Action !, la programmation développée par Pedro Morais (en coordination avec Vanina Andréani au Frac), propose donc trois angles sous lesquels éclairer le champ toujours protéiforme de la performance : Extérieur jour (jusqu’au 20 mai), Accessoires (du 20 au 31 mai), et Second rôle (du 1er au 10 juin).
Dans Extérieur jour, la performance est à mettre en relation avec la construction de « situations » qui scénarisent le réel, où il s’agit de développer des rapports spécifiques avec l’espace, qui fonctionne alors comme décor et environnement symbolique. On y trouve ainsi un parcours virtuel dans l’architecture du jeu vidéo qui transforme la performance du joueur en dérive mélancolique (Stefan Altenburger) ou induit une fausse interactivité (Cory Arcangel). Suivant en cela les évolutions de la notion, la performance dans Action ! est aussi à comprendre au sens d’efficacité économique. Dans Hear me Children Yet To Be Born de Sandy Amerio, un couple de cadres supérieurs (joués par des acteurs) lutte pour sa survie dans le désert de la Death Valley. L’homme et la femme sont soumis à une voix démiurgique, qui mêle injonctions d’entreprises et évocations bibliques. La vidéo met en scène, dans un environnement hostile et aride, la pratique du « story-telling » dans les entreprises anglo-saxonnes, qui consiste à créer un univers fictionnel porteur des valeurs de l’entreprise… et de ses modifications potentielles : licenciements, délocalisations. Ainsi, plutôt que de chercher à créer un « espace social interactif », les artistes assument ce lieu d’échange comme un espace déjà socialisé, où il s’agit de rendre conscients les notions de mise en scène (et en ordre) ou de rôle social (Marcus Coates, Bernadette Corporation). La « neutralité » du white cube de la galerie (Aaron Young, Mircea Cantor), tout comme les dispositifs institutionnels (Andrea Fraser, Doug Fishbone), sont interrogés par l’irruption d’éléments extérieurs.
Enfin, l’espace « monitor », par lequel on peut débuter ou clore la visite, propose une documentation sur la performance, réalisée par un artiste différent à chaque volet. Pour Extérieur jour, l’artiste Francesco Finizio a choisi des extraits de films et de clips qui fonctionnent en interaction les uns avec les autres, par le fait qu’il montrent la performance physique d’un concert ou d’un match de boxe, mais aussi l’énergie dégagée par la foule présente à ces manifestations. Face à la richesse de ce premier volet, il serait dommage de se priver d’Accessoires, où la dialectique sujet-objet se dissout dans l’activation d’événements, et de Second rôle, qui envisage les questions du corps et de la multiplicité de nos identités.
Mélanie Rémond
Le 20/05 à 19h : Une histoire de la performance en 20 minutes, conférence du critique d’art et commissaire d’expo Guillaume Désanges, avec l’acteur Frédéric Cherboeuf.